Le pape a subi une trachéotomie à l'hôpital Gemelli de Rome
LE MONDE | 25.02.05
Cette opération chirurgicale, qui a nécessité une courte anesthésie générale, a été un "succès", selon le Vatican. Mais l'état de santé de Jean Paul II, réhospitalisé jeudi 24 février en catastrophe, continue d'inspirer les plus vives inquiétudes.
Dans l'attente du communiqué médical que devait publier vendredi 25 février à midi, Joaquin Navarro-Valls, porte-parole du Saint-Siège, les nouvelles de Jean Paul II, âgé de 84 ans, étaient jugées plus rassurantes à Rome après l'opération subie dans la nuit à l'hôpital Gemelli, où il avait été de nouveau admis en catastrophe jeudi matin.
Le pape a subi "avec succès", disait un communiqué du Vatican, une trachéotomie, incision dans le cou et la trachée permettant un passage direct de l'air dans les poumons. Cette septième intervention chirurgicale subie par Jean Paul II en vingt-cinq ans a duré environ une demi-heure, précédée d'une "légère anesthésie générale". "L'évolution postopératoire est régulière", poursuivait le communiqué. Le malade n'a pas été placé dans un centre de soins intensifs.
"Les médecins sont très satisfaits de la manière dont le pape a résisté à l'intervention chirurgicale et des premières heures de la phase post-opératoire", affirmait de son côté Gianni Letta, conseiller du gouvernement Silvio Berlusconi, qui a pu apercevoir le pape à son réveil et s'entretenir avec les chirurgiens.
Cette opération nocturne avait mis fin - provisoirement - à une journée d'extrême inquiétude. La nouvelle hospitalisation de Jean Paul II à la polyclinique Gemelli, jeudi 24 février vers 11 h 30, avait pris tout le monde de court, y compris son collaborateur de tous les instants, Angelo Sodano, secrétaire d'Etat, informé à la dernière seconde du transfert du pape en ambulance jusqu'à l'hôpital, distant de cinq kilomètres.
A 10 heures, la présence de Jean Paul II à un consistoire public, devant examiner cinq "causes" de canonisation, était annoncée comme certaine, salle Clémentine, dans le palais apostolique. Mais, dès le début de la cérémonie, le cardinal secrétaire d'Etat devait lire, dans la confusion, un message bref reçu du pape un peu plus tôt : "Pour des raisons de prudence, on m'a conseillé de suivre le déroulement du consistoire depuis mes appartements, par le biais d'un lien télévisé interne."
"RECHUTE" GRIPPALE
La "disparition" soudaine du pape et l'annonce du cardinal Sodano avaient alors précipité les journalistes vers la salle de presse du Saint-Siège. Joaquin Navarro-Valls lisait un communiqué déclarant que le pape avait fait une "rechute" de sa grippe et été admis de nouveau à Gemelli. Les craintes de spasmes et autres complications respiratoires se faisaient jour à nouveau comme lors de la précédente hospitalisation.
La veille, mercredi 23 février, pour la première fois de son pontificat, Jean Paul II n'avait pu participer que par liaison vidéo à l'audience publique hebdomadaire, salle Paul-VI. Son élocution était plus laborieuse encore que les précédents jours. Il était apparu "épuisé". Ces conditions ont empiré dans l'après-midi du 23 février. Les spasmes ont repris et se sont aggravés jeudi matin, nécessitant la nouvelle hospitalisation en urgence.
Avant la trachéotomie, le pape était arrivé conscient mais fiévreux à l'hôpital Gemelli, où il dispose d'un appartement privé au dixième étage. Il a été mis sous assistance respiratoire, avant l'arrivée en urgence des médecins réanimateurs, notamment du docteur Rodolfo Proietti. Jean Paul II est entouré de ses deux seuls secrétaires polonais, Mgr Stanislas Dziwisz et Mgr Mieczyslaw Mokrzycki, ainsi que d'une religieuse polonaise, sœur Tobiana, en permanence à ses côtés.
CLIMAT PLUS ALARMANT
Le climat est donc incomparablement plus alarmant cette fois à Rome que lors de l'hospitalisation du 1er février. Déjà percent à la curie des interrogations et des regrets sur la nécessité qu'il y avait à faire revenir si vite le convalescent de Gemelli. La grippe n'atteint pas le sujet malade d'un syndrome de Parkinson dans les mêmes conditions que les autres. Les risques de complications respiratoires, puis cardiaques sont lourds. De nombreux médecins avaient prévenu, dès la première hospitalisation, qu'un sérieux risque de rechute existait.
Tout avait été fait, après son retour "triomphal", en papamobile, de l'hôpital Gemelli, le 10 février, pour montrer au monde que la vie avait repris son cours au Vatican. Dès le lendemain, le 11, le pape faisait annoncer la nomination d'un nouvel archevêque à Paris.
La semaine suivante, il reprenait quelques forces lors des traditionnels "exercices spirituels" de Carême, prêchés cette année par un évêque italien, Mgr Renato Corti. Son état semblait stabilisé, lui permettant même de reprendre ses audiences au palais apostolique. Le mardi 22 février, le premier ministre croate, Ivo Sanader, était reçu par le pape. Ce fut sa dernière rencontre officielle.
Le dimanche 13, Jean Paul II était apparu à la fenêtre de ses appartements place Saint-Pierre pour la prière de l'Angélus, mais incapable encore de s'exprimer. "J'ai toujours besoin de votre aide devant le Seigneur pour accomplir la mission que Jésus m'a confiée", avait déclaré en son nom le substitut Leonardo Sandri.
La stupeur créée par sa nouvelle hospitalisation jeudi était d'autant plus grande que, une semaine plus tard, dimanche 20 février, le pape avait pu prononcer lui-même les prières de l'Angelus.
Henri Tincq
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 26.02.05
Cette opération chirurgicale, qui a nécessité une courte anesthésie générale, a été un "succès", selon le Vatican. Mais l'état de santé de Jean Paul II, réhospitalisé jeudi 24 février en catastrophe, continue d'inspirer les plus vives inquiétudes.
Dans l'attente du communiqué médical que devait publier vendredi 25 février à midi, Joaquin Navarro-Valls, porte-parole du Saint-Siège, les nouvelles de Jean Paul II, âgé de 84 ans, étaient jugées plus rassurantes à Rome après l'opération subie dans la nuit à l'hôpital Gemelli, où il avait été de nouveau admis en catastrophe jeudi matin.
Le pape a subi "avec succès", disait un communiqué du Vatican, une trachéotomie, incision dans le cou et la trachée permettant un passage direct de l'air dans les poumons. Cette septième intervention chirurgicale subie par Jean Paul II en vingt-cinq ans a duré environ une demi-heure, précédée d'une "légère anesthésie générale". "L'évolution postopératoire est régulière", poursuivait le communiqué. Le malade n'a pas été placé dans un centre de soins intensifs.
"Les médecins sont très satisfaits de la manière dont le pape a résisté à l'intervention chirurgicale et des premières heures de la phase post-opératoire", affirmait de son côté Gianni Letta, conseiller du gouvernement Silvio Berlusconi, qui a pu apercevoir le pape à son réveil et s'entretenir avec les chirurgiens.
Cette opération nocturne avait mis fin - provisoirement - à une journée d'extrême inquiétude. La nouvelle hospitalisation de Jean Paul II à la polyclinique Gemelli, jeudi 24 février vers 11 h 30, avait pris tout le monde de court, y compris son collaborateur de tous les instants, Angelo Sodano, secrétaire d'Etat, informé à la dernière seconde du transfert du pape en ambulance jusqu'à l'hôpital, distant de cinq kilomètres.
A 10 heures, la présence de Jean Paul II à un consistoire public, devant examiner cinq "causes" de canonisation, était annoncée comme certaine, salle Clémentine, dans le palais apostolique. Mais, dès le début de la cérémonie, le cardinal secrétaire d'Etat devait lire, dans la confusion, un message bref reçu du pape un peu plus tôt : "Pour des raisons de prudence, on m'a conseillé de suivre le déroulement du consistoire depuis mes appartements, par le biais d'un lien télévisé interne."
"RECHUTE" GRIPPALE
La "disparition" soudaine du pape et l'annonce du cardinal Sodano avaient alors précipité les journalistes vers la salle de presse du Saint-Siège. Joaquin Navarro-Valls lisait un communiqué déclarant que le pape avait fait une "rechute" de sa grippe et été admis de nouveau à Gemelli. Les craintes de spasmes et autres complications respiratoires se faisaient jour à nouveau comme lors de la précédente hospitalisation.
La veille, mercredi 23 février, pour la première fois de son pontificat, Jean Paul II n'avait pu participer que par liaison vidéo à l'audience publique hebdomadaire, salle Paul-VI. Son élocution était plus laborieuse encore que les précédents jours. Il était apparu "épuisé". Ces conditions ont empiré dans l'après-midi du 23 février. Les spasmes ont repris et se sont aggravés jeudi matin, nécessitant la nouvelle hospitalisation en urgence.
Avant la trachéotomie, le pape était arrivé conscient mais fiévreux à l'hôpital Gemelli, où il dispose d'un appartement privé au dixième étage. Il a été mis sous assistance respiratoire, avant l'arrivée en urgence des médecins réanimateurs, notamment du docteur Rodolfo Proietti. Jean Paul II est entouré de ses deux seuls secrétaires polonais, Mgr Stanislas Dziwisz et Mgr Mieczyslaw Mokrzycki, ainsi que d'une religieuse polonaise, sœur Tobiana, en permanence à ses côtés.
CLIMAT PLUS ALARMANT
Le climat est donc incomparablement plus alarmant cette fois à Rome que lors de l'hospitalisation du 1er février. Déjà percent à la curie des interrogations et des regrets sur la nécessité qu'il y avait à faire revenir si vite le convalescent de Gemelli. La grippe n'atteint pas le sujet malade d'un syndrome de Parkinson dans les mêmes conditions que les autres. Les risques de complications respiratoires, puis cardiaques sont lourds. De nombreux médecins avaient prévenu, dès la première hospitalisation, qu'un sérieux risque de rechute existait.
Tout avait été fait, après son retour "triomphal", en papamobile, de l'hôpital Gemelli, le 10 février, pour montrer au monde que la vie avait repris son cours au Vatican. Dès le lendemain, le 11, le pape faisait annoncer la nomination d'un nouvel archevêque à Paris.
La semaine suivante, il reprenait quelques forces lors des traditionnels "exercices spirituels" de Carême, prêchés cette année par un évêque italien, Mgr Renato Corti. Son état semblait stabilisé, lui permettant même de reprendre ses audiences au palais apostolique. Le mardi 22 février, le premier ministre croate, Ivo Sanader, était reçu par le pape. Ce fut sa dernière rencontre officielle.
Le dimanche 13, Jean Paul II était apparu à la fenêtre de ses appartements place Saint-Pierre pour la prière de l'Angélus, mais incapable encore de s'exprimer. "J'ai toujours besoin de votre aide devant le Seigneur pour accomplir la mission que Jésus m'a confiée", avait déclaré en son nom le substitut Leonardo Sandri.
La stupeur créée par sa nouvelle hospitalisation jeudi était d'autant plus grande que, une semaine plus tard, dimanche 20 février, le pape avait pu prononcer lui-même les prières de l'Angelus.
Henri Tincq
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 26.02.05
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