2.25.2005

Le Pape opéré en urgence

Le Souverain Pontife a fait une rechute de la grippe qu'il avait contractée fin janvier

Jean Paul II a passé la nuit sous assistance respiratoire à l'hôpital Gemelli de Rome où il a été admis en urgence pour la deuxième fois en 24 jours, et des spécialistes italiens se montrent pessimistes après la trachéotomie qui le prive de la voix.

Le Vatican: Hervé Yannou
[LE FIGARO, 25 février 2005]

Jean-Paul II a de nouveau été hospitalisé hier à l'hôpital Gemelli de Rome, pour une «rechute» de la grippe qu'il avait contractée dans les derniers jours de janvier et qui avait déjà nécessité une hospitalisation de neuf jours. Le Pape serait arrivé en ambulance à l'hôpital peu après 11h30, conscient et le visage serein, mais transporté sur un brancard, selon les témoignages de membres du personnel de l'hôpital à qui il aurait adressé quelques signes de la main.
Lorsque la nouvelle de l'hospitalisation du Pape est officiellement tombée en fin de matinée, plusieurs cardinaux de la curie, de hauts prélats et des ambassadeurs étaient réunis en consistoire – une réunion officielle – dans le Palais apostolique du Vatican. Ils n'ont été avertis de la situation qu'à l'issue de leur rencontre.
Le Souverain Pontife a donc été victime mercredi d'une «rechute», selon le porte-parole du Vatican, Joaquin Navarro-Valls. Les symptômes de la grippe, qui se greffent sur de graves problèmes respiratoires, sont à nouveau apparus, nécessitant «une assistance spécialisée» et «des examens». Des propos qui trahissent un état de santé préoccupant.
Étant donné la volonté manifestée ces temps-ci par le Saint-Siège de ne pas alarmer l'opinion publique, cette hospitalisation devait être urgente et absolument nécessaire. Son état de santé ne lui permettait plus d'être soigné dans ses appartements du Vatican, commentaient des membres de la curie romaine à la sortie du consistoire.
Jean-Paul II aurait dû, en principe, assister à cette réunion qui avait pour objectif de proclamer officiellement les noms de cinq futurs saints de l'Eglise catholique. Le «numéro deux» du Vatican, le cardinal Angelo Sodano, l'a remplacé pour cette mission. Mais par «mesure de prudence», avant même que son état empire, le Pape lui avait déjà indiqué par lettre qu'il lui avait été conseillé de suivre l'événement depuis ses appartements par le biais de la télévision interne.
Aussitôt la nouvelle de son hospitalisation connue, la presse internationale a retrouvé son poste devant l'hôpital romain, déjà rodée par les neuf jours de veille entre le 1er et le 10 février dernier. Les télévisions du monde entier ont à nouveau garé leurs camions-régie sur le parking qui surplombe le bâtiment et les hôtels des alentours ont été pris d'assaut. Les téléobjectifs sont braqués sur les fenêtres aux stores baissés des chambres du dixième étage de l'hôpital, en permanence réservées au Pape et à sa suite. Dans le hall principal de la clinique Gemelli, une salle de presse a été immédiatement réinstallée. Des officiers de la police et de la gendarmerie italienne ont tranquillement réorganisé le dispositif de sécurité.
Depuis le retour du Pape au Vatican il y a dix jours, les commentateurs sont restés l'arme au pied. L'incertitude régnait devant la capacité du Pape à surmonter les séquelles de son hospitalisation. Tout a pourtant été fait pour les rassurer. Arrivé en ambulance par la petite porte en pleine nuit, Jean-Paul II avait triomphalement regagné le Vatican en papamobile panoramique. Ses apparitions publiques restaient cependant suspendues au diagnostic de son entourage et en particulier de son médecin personnel, Renato Buzzonetti.
Le Pape a pu poursuivre sa convalescence la semaine dernière. Aucune audience publique ou privée n'était inscrite à l'agenda. Dimanche dernier, Jean-Paul II est apparu à la fenêtre de son bureau pour la traditionnelle prière de l'Angélus. Des milliers de pèlerins, réunis place Saint-Pierre, l'ont entendu prononcer assez clairement les quelques lignes de son message.
Tout semblait devoir rentrer dans l'ordre. Lundi, il reprenait ses audiences en recevant des évêques espagnols. Mardi, c'était au tour du premier ministre croate. Les polémiques devant une éventuelle renonciation du Pape semblaient devoir se taire.
Pourtant, mercredi, la traditionnelle audience générale, la première depuis trois semaines, n'a pas eu lieu. Devant la pluie et le froid qui frappent Rome, Jean-Paul II a renoncé à apparaître à la fenêtre de ses appartements pour saluer les fidèles malgré la vitre protectrice. C'est par vidéoconférence qu'il leur a difficilement adressé quelques mots.
La nouvelle hospitalisation de Jean-Paul II fait craindre le pire. Silvio Berlusconi, les membres du gouvernement italien, les cardinaux et hauts prélats qui ont assisté aux obsèques du fondateur du mouvement ecclésial Communion et Libération, Dom Luigi Giussani, à Milan sont précipitamment rentrés à Rome. Le prochain bulletin de santé est attendu pour aujourd'hui en fin de matinée.
La dernière apparition de Jean-Paul II a eu lieu par vidéoconférence, au cours de laquelle le Pape difficilement adressé quelques mots aux fidèles.
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