4.27.2005

Un proche de Jean Paul II collaborateur des services communistes polonais

LEMONDE.FR | 27.04.05 | 17h39  •  Mis à jour le 27.04.05 | 19h27

Le père Konrad Hejmo, chargé des pèlerins polonais au Vatican et proche du pape défunt Jean Paul II, a été accusé, mercredi 27 avril, d'avoir collaboré avec les services de sécurité communistes polonais (SB). Il a qualifié ces accusations d'"absurdes". "C'est complètement absurde. Il y a eu des gens qui venaient nous voir comme soi-disant de grands amis, et qui s'intéressaient à tout, au pape", a-t-il dit au téléphone à la télévision publique polonaise TVP.
Le père Hejmo a confirmé avoir été "sollicité" par la SB à l'époque communiste, comme "tous les prêtres" en Pologne. "Tout prêtre avait forcément son tuteur" de la SB, a-t-il dit.
L'Institut de la mémoire nationale (IPN) qui instruit les crimes nazis et communistes, a annoncé mercredi que le père Konrad Hejmo aurait collaboré avec les services de sécurité communistes polonais (SB). "L'IPN dispose des dossiers attestant que le père Konrad Stanislaw Hejmo collaborait secrètement dans les années 1980 avec les services de sécurité de la Pologne communiste", a déclaré devant la presse le président de l'IPN, Leon Kieres.
Interrogé sur ces documents, le père Hejmo a affirmé qu'il pouvait s'agir de nombreux "articles" qu'il avait écrits, notamment en tant que directeur adjoint du bureau de presse de l'épiscopat polonais à Rome après 1979. "Quand j'écrivais un article, je le signais forcément. Ils étaient envoyés au primat de Pologne, avec une revue de la presse italienne sur le pape", a-t-il dit. Il n'a pas exclu que ses conversations aient pu être enregistrées à son insu et aient "fait l'objet de montages" par les services spéciaux.
Le père Hejmo, un moine dominicain âgé de 69 ans, utilisait dans ses rapports avec SB les pseudonymes "Hejnal" et "Dominik", a ajouté M. Kieres. Envoyé à Rome en 1979 par le primat de Pologne de l'époque, Mgr Stefan Wyszynski, le père Hejmo y est devenu directeur d'un centre pour pèlerins polonais Corda Cordi. Dans les années 1980, il organisait l'aide aux immigrés polonais à Rome.
Les dossiers du père Hejmo comprennent 700 pages de documents et portent sur sa collaboration avec la SB dans les années 1980 "et avant", selon les responsables de l'IPN. Il connaissait le cardinal Karol Wojtyla avant son élection à Rome. "Il avait accès aux plus proches collaborateurs de Jean Paul II", a affirmé à la TV 24 Jacek Palasinski, correspondant de cette chaîne de télévision polonaise à Rome.


"GRANDE SURPRISE"

Interrogé par l'AFP, Mgr Tadeusz Pieronek, membre de l'épiscopat polonais, a qualifié l'information donnée par M. Kieres de "grande surprise". "Il ne faut pas oublier que ce système  - communiste - était sans pitié. Il est facile de condamner, mais ce système avait tout le monde dans ses tenailles", a souligné Mgr Pieronek. Selon lui, ce n'est toutefois "pas le moment pour ce genre d'informations, après tout ce que nous avons vécu avec la mort du pape".
Le président de l'IPN avait annoncé la semaine dernière que son institut disposait de nouvelles traces de mouchards des services de sécurité communistes dans le proche entourage ecclésiastique de Karol Wojtyla. Il a précisé qu'il s'agissait notamment d'enregistrements audio de dépositions de l'un d'eux, "un ecclésiastique", dont la voix était "reconnaissable".
Ce moine dominicain est responsable des pèlerins polonais au Vatican depuis vingt et un ans, et à ce titre, avait ses entrées auprès du proche entourage de Jean Paul II. Pendant les dernières semaines de vie de Jean Paul II, il informait régulièrement les médias sur la santé du souverain pontife, mort le 2 avril à l'âge de 84 ans.
Grand, mince, aisément reconnaissable avec son épaisse chevelure blanche, le moine polonais était sur la place Saint-Pierre au milieu des pèlerins polonais à chaque apparition du pape pour les audiences générales ou pour l'angélus du dimanche. Lors des deux dernières hospitalisation de Jean Paul II en février et mars, le père Hejmo avait emmené avec lui des groupes de Polonais devant l'hôpital Gemelli pour prier et chanter sous les fenêtres de sa chambre.
Le 16 mars, le pape, qui avait regagné ses appartements du Vatican, avait fait une apparition surprise à la fenêtre de son bureau pour bénir les pèlerins polonais quelque minutes après un échange téléphonique entre le père Hejmo et Mgr Stanislaw Dziwisz, le secrétaire particulier de Jean Paul II.

Avec AFP
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