Benoît XVI redoute un choc des civilisations avec l'islam
Hervé Yannou .
Le Figaro 13 septembre 2006
Le pape a célébré la dernière grande messe de son voyage en Bavière à Ratisbonne devant 260 000 fidèles.
AVANT de se recueillir aujourd'hui sur la tombe de ses parents, Benoît XVI est, hier, redevenu le professeur Ratzinger. Après une plongée, lundi, dans la Bavière de son enfance, au sanctuaire marial d'Altötting, le Pape a célébré la dernière grande messe de son voyage en Bavière à Ratisbonne, où il a autrefois enseigné. S'il n'avait fait aucun commentaire personnel pour le cinquième anniversaire des attentats du 11 Septembre, hier il a pour la première fois livré une réflexion sur l'islam.
Il a surtout mis en garde l'Occident contre un choc de civilisations qui pourrait lui être fatal.
Devant les «pathologies et les maladies mortelles de la religion et de la raison» qui détruisent l'image de Dieu «à cause de la haine et du fanatisme», il a ainsi demandé à 260 000 fidèles de dire «en quel Dieu ils croient» et de professer «le visage d'un Dieu humain». C'est, selon lui, le seul moyen de se libérer de «l'athéisme moderne». Mais c'est aussi dans ce diagnostic que réside la différence fondamentale entre le christianisme et le monde musulman.
Une vision différente de Dieu
C'est dans l'après-midi et dans l'atmosphère familière du grand amphithéâtre de l'université de Ratisbonne, que le Pape a livré sa démonstration devant un aréopage d'universitaires. Il a conduit sa réflexion sur le rapport entre religion, raison et science, en partant de l'Islam. Filant la métaphore à partir d'une controverse qui a bien eu lieu au XIVe siècle entre un empereur byzantin prêt à céder aux assauts de l'Islam ottoman et un lettré musulman, le Pape a rappelé que «la violence est contraire à la nature de Dieu» et à la raison, à laquelle est liée «la compréhension de Dieu et donc la réalisation concrète de la religion». Si ceci est évident pour un chrétien, en revanche la conception musulmane de Dieu «n'est liée à aucune de nos catégories, fusse-t-elle celle de la raison».
Pour Benoît XVI, chrétiens et musulmans ne partagent donc ni la même philosophie et surtout pas la même vision de Dieu. Le christianisme héritier du monde grec antique est, lui, lié à la raison. C'est cette rencontre entre chrétienté et philosophie antique qui «demeure le fondement de ce que l'on peut appeler avec raison l'Europe», a ainsi déclaré le Pape, qui doit se rendre en Turquie à la fin du mois de novembre.
Ainsi, si le monde occidental qui «domine largement la pensée» veut conserver sa suprématie, il ne doit pas croire que «Dieu est superflu» et opposer science et foi chrétienne. En effet, «les cultures profondément religieuses du monde voient dans l'exclusion du divin une attaque contre leur conviction les plus intimes». L'Occident chrétien «repoussant la religion dans le champ de la sous-culture» serait incapable «de s'insérer dans le dialogue des cultures». Le Pape en concluant sa journée par une rencontre avec des représentants orthodoxes et protestants dans la cathédrale de Ratisbonne, leur a ainsi demandé de constituer une sorte de front commun, «d'être les témoins d'un mode de vie» dans «un monde plein de confusion».
Le Figaro 13 septembre 2006
Le pape a célébré la dernière grande messe de son voyage en Bavière à Ratisbonne devant 260 000 fidèles.
AVANT de se recueillir aujourd'hui sur la tombe de ses parents, Benoît XVI est, hier, redevenu le professeur Ratzinger. Après une plongée, lundi, dans la Bavière de son enfance, au sanctuaire marial d'Altötting, le Pape a célébré la dernière grande messe de son voyage en Bavière à Ratisbonne, où il a autrefois enseigné. S'il n'avait fait aucun commentaire personnel pour le cinquième anniversaire des attentats du 11 Septembre, hier il a pour la première fois livré une réflexion sur l'islam.
Il a surtout mis en garde l'Occident contre un choc de civilisations qui pourrait lui être fatal.
Devant les «pathologies et les maladies mortelles de la religion et de la raison» qui détruisent l'image de Dieu «à cause de la haine et du fanatisme», il a ainsi demandé à 260 000 fidèles de dire «en quel Dieu ils croient» et de professer «le visage d'un Dieu humain». C'est, selon lui, le seul moyen de se libérer de «l'athéisme moderne». Mais c'est aussi dans ce diagnostic que réside la différence fondamentale entre le christianisme et le monde musulman.
Une vision différente de Dieu
C'est dans l'après-midi et dans l'atmosphère familière du grand amphithéâtre de l'université de Ratisbonne, que le Pape a livré sa démonstration devant un aréopage d'universitaires. Il a conduit sa réflexion sur le rapport entre religion, raison et science, en partant de l'Islam. Filant la métaphore à partir d'une controverse qui a bien eu lieu au XIVe siècle entre un empereur byzantin prêt à céder aux assauts de l'Islam ottoman et un lettré musulman, le Pape a rappelé que «la violence est contraire à la nature de Dieu» et à la raison, à laquelle est liée «la compréhension de Dieu et donc la réalisation concrète de la religion». Si ceci est évident pour un chrétien, en revanche la conception musulmane de Dieu «n'est liée à aucune de nos catégories, fusse-t-elle celle de la raison».
Pour Benoît XVI, chrétiens et musulmans ne partagent donc ni la même philosophie et surtout pas la même vision de Dieu. Le christianisme héritier du monde grec antique est, lui, lié à la raison. C'est cette rencontre entre chrétienté et philosophie antique qui «demeure le fondement de ce que l'on peut appeler avec raison l'Europe», a ainsi déclaré le Pape, qui doit se rendre en Turquie à la fin du mois de novembre.
Ainsi, si le monde occidental qui «domine largement la pensée» veut conserver sa suprématie, il ne doit pas croire que «Dieu est superflu» et opposer science et foi chrétienne. En effet, «les cultures profondément religieuses du monde voient dans l'exclusion du divin une attaque contre leur conviction les plus intimes». L'Occident chrétien «repoussant la religion dans le champ de la sous-culture» serait incapable «de s'insérer dans le dialogue des cultures». Le Pape en concluant sa journée par une rencontre avec des représentants orthodoxes et protestants dans la cathédrale de Ratisbonne, leur a ainsi demandé de constituer une sorte de front commun, «d'être les témoins d'un mode de vie» dans «un monde plein de confusion».
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