Quatre abbés lefebvristes historiques rallient Rome
Hervé Yannou
Publié le 09 septembre 2006
Actualisé le 09 septembre 2006 : 22h04
Le Vatican a fait d'importantes concessions à un petit groupe dissident de la Fraternité Saint-Pie X, ouvrant une brèche pour d'autres catholiques en délicatesse avec Rome.
UN AN APRÈS la rencontre historique entre Benoît XVI et Mgr Bernard Fellay, le chef de file des lefebvristes, les négociations pour la «réconciliation» semblaient au point mort. Las d'attendre que la famille intégriste surmonte ses désaccords, le Vatican s'est décidé à passer à l'offensive : hier, le Saint-Siège a largement ouvert les bras à un petit groupe de lefebvristes «historiques», dissidents de la Fraternité Saint-Pie X. Rome n'a pas ménagé ses concessions dans cet accord dont l'objectif est clairement de bousculer les lefebvristes récalcitrants pour accélérer le rapprochement.
Par un décret en latin qui n'a pas encore été rendu public, la Congrégation pour le clergé a érigé un nouvel institut religieux de droit pontifical, celui du «Bon pasteur». Il aura à sa tête l'abbé Philippe Laguérie, exclu de la Fraternité Saint-Pie X. Curé de la paroisse lefebvriste de Saint-Éloi à Bordeaux, il avait vertement critiqué en 2004 la gestion des séminaires de la Fraternité.
Dans son ralliement à Rome, il est suivi par l'abbé Christophe Héry et l'abbé Guillaume de Tanoüarn – fondateur de l'Association cultuelle Saint-Marcel et du centre Saint-Paul à Paris – exclus avec lui. L'abbé Paul Aulagnier, ancien bras droit de Mgr Marcel Lefebvre, longtemps supérieur général en France de la Fraternité (1976-1994), mais évincé en 2003, les a suivis.
Un cinquième prêtre, en poste à Bordeaux, l'abbé Henri Forestier, fait aussi partie des premiers membres de l'institut, avec le diacre Claude Prieur et plusieurs séminaristes. Certains d'entre eux seront prochainement ordonnés par le cardinal Dario Castrillon Hoyos, en charge du dossier des lefebvristes à Rome.
Le siège de ce nouvel institut devrait cependant être en France, à Bordeaux, à l'église Saint-Éloi. Le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de la ville, pourrait accepter que cette église lui soit affectée. Il récupérerait ainsi une église de son diocèse dont l'abbé Laguérie a pris possession, il y a quatre ans, avec le soutien du conseil municipal.
Les revendications de toujours de Mgr Lefebvre
La création de l'Institut Bon Pasteur marque une nouvelle étape dans le rapprochement avec les traditionalistes. Les concessions faites par Rome sont de taille : les membres du Bon Pasteur sont autorisés à célébrer la messe «exclusivement» selon la liturgie traditionnelle de saint Pie V. Ils s'invitent aussi à «une critique constructive» du concile Vatican II.
Ni la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre, ralliée au Vatican en 1988, ni la Fraternité traditionaliste de saint Jean-Marie Vianney, érigé en 2002 au Brésil, n'avaient été créées sous les mêmes auspices. Le Saint-Siège leur avait accordé le droit de célébrer la messe selon le missel tridentin, à condition de reconnaître le concile Vatican II, interprété «à la lumière de la tradition».
À Rome et dans les rangs du nouvel institut, on souligne aussi que cet accord correspond aux revendications de toujours de Mgr Marcel Lefebvre mort en 1991. Le Vatican ouvre ainsi une brèche dans laquelle de nombreux fidèles en délicatesse avec Rome pourraient s'engouffrer.
L'initiative du Vatican passe mal dans les rangs de la Fraternité Saint-Pie X, alors que les termes d'un accord possible avec le Saint-Siège avaient été discutés au printemps dernier. Ses responsables restent pour le moment silencieux. Quant aux responsables du Bon Pasteur, ils espèrent que d'autres prêtres de la Fraternité Saint-Pie X saisiront cette occasion pour les rejoindre et regagner ainsi la pleine communion avec le Pape.
Publié le 09 septembre 2006
Actualisé le 09 septembre 2006 : 22h04
Le Vatican a fait d'importantes concessions à un petit groupe dissident de la Fraternité Saint-Pie X, ouvrant une brèche pour d'autres catholiques en délicatesse avec Rome.
UN AN APRÈS la rencontre historique entre Benoît XVI et Mgr Bernard Fellay, le chef de file des lefebvristes, les négociations pour la «réconciliation» semblaient au point mort. Las d'attendre que la famille intégriste surmonte ses désaccords, le Vatican s'est décidé à passer à l'offensive : hier, le Saint-Siège a largement ouvert les bras à un petit groupe de lefebvristes «historiques», dissidents de la Fraternité Saint-Pie X. Rome n'a pas ménagé ses concessions dans cet accord dont l'objectif est clairement de bousculer les lefebvristes récalcitrants pour accélérer le rapprochement.
Par un décret en latin qui n'a pas encore été rendu public, la Congrégation pour le clergé a érigé un nouvel institut religieux de droit pontifical, celui du «Bon pasteur». Il aura à sa tête l'abbé Philippe Laguérie, exclu de la Fraternité Saint-Pie X. Curé de la paroisse lefebvriste de Saint-Éloi à Bordeaux, il avait vertement critiqué en 2004 la gestion des séminaires de la Fraternité.
Dans son ralliement à Rome, il est suivi par l'abbé Christophe Héry et l'abbé Guillaume de Tanoüarn – fondateur de l'Association cultuelle Saint-Marcel et du centre Saint-Paul à Paris – exclus avec lui. L'abbé Paul Aulagnier, ancien bras droit de Mgr Marcel Lefebvre, longtemps supérieur général en France de la Fraternité (1976-1994), mais évincé en 2003, les a suivis.
Un cinquième prêtre, en poste à Bordeaux, l'abbé Henri Forestier, fait aussi partie des premiers membres de l'institut, avec le diacre Claude Prieur et plusieurs séminaristes. Certains d'entre eux seront prochainement ordonnés par le cardinal Dario Castrillon Hoyos, en charge du dossier des lefebvristes à Rome.
Le siège de ce nouvel institut devrait cependant être en France, à Bordeaux, à l'église Saint-Éloi. Le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de la ville, pourrait accepter que cette église lui soit affectée. Il récupérerait ainsi une église de son diocèse dont l'abbé Laguérie a pris possession, il y a quatre ans, avec le soutien du conseil municipal.
Les revendications de toujours de Mgr Lefebvre
La création de l'Institut Bon Pasteur marque une nouvelle étape dans le rapprochement avec les traditionalistes. Les concessions faites par Rome sont de taille : les membres du Bon Pasteur sont autorisés à célébrer la messe «exclusivement» selon la liturgie traditionnelle de saint Pie V. Ils s'invitent aussi à «une critique constructive» du concile Vatican II.
Ni la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre, ralliée au Vatican en 1988, ni la Fraternité traditionaliste de saint Jean-Marie Vianney, érigé en 2002 au Brésil, n'avaient été créées sous les mêmes auspices. Le Saint-Siège leur avait accordé le droit de célébrer la messe selon le missel tridentin, à condition de reconnaître le concile Vatican II, interprété «à la lumière de la tradition».
À Rome et dans les rangs du nouvel institut, on souligne aussi que cet accord correspond aux revendications de toujours de Mgr Marcel Lefebvre mort en 1991. Le Vatican ouvre ainsi une brèche dans laquelle de nombreux fidèles en délicatesse avec Rome pourraient s'engouffrer.
L'initiative du Vatican passe mal dans les rangs de la Fraternité Saint-Pie X, alors que les termes d'un accord possible avec le Saint-Siège avaient été discutés au printemps dernier. Ses responsables restent pour le moment silencieux. Quant aux responsables du Bon Pasteur, ils espèrent que d'autres prêtres de la Fraternité Saint-Pie X saisiront cette occasion pour les rejoindre et regagner ainsi la pleine communion avec le Pape.
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