9.16.2006

Le pape Benoît XVI se dit "absolument désolé"

lefigaro.fr (avec Reuters et AFP).
Publié le 16 septembre 2006
Actualisé le 16 septembre 2006 : 16h38

Le Vatican a fait savoir que le Pape regrettait d’avoir donné l'impression d'offenser les croyants musulmans, après sa déclaration sur l’islam et la violence qui a provoqué un flot de protestations. Le courroux du monde islamique ne semble pas tout à fait apaisé.

Le Pape est «absolument désolé que certains passages de son discours aient pu paraître offensants pour la sensibilité des croyants musulmans», a déclaré le Secrétaire d'Etat du Vatican, Tarcisio Bertone, samedi. «L'opinion du pape en faveur du dialogue interreligieux et interculturel est absolument sans équivoque », a-t-il martelé.

Lors de sa visite en Allemagne, le souverain pontife avait établi, mardi, un lien implicite entre islam et violence en évoquant le jihad (la guerre sainte). Il avait cité un empereur byzantin du 14e siècle qui avait dit que le prophète Mahomet n'avait apporté que «des choses mauvaises et inhumaines».

Des églises comme cibles

Mais malgré le «mea culpa» du Vatican, les condamnations se poursuivent dans le monde musulman. Les propos de Tarcisio Bertone «ne constituent pas une excuse» du Pape, ont immédiatement réagi les Frères musulmans, qui exigent des excuses personnelles. «Si les déclarations du Pape n'étaient qu'un lapsus, dans ce cas les excuses seraient suffisantes», a précisé le secrétaire général du plus influent parti en Jordanie, le Front de l'Action islamique, émanation des Frères musulmans. Et de souhaiter que «ces déclarations ne soient pas une expression des positions du Pape et de l'église catholique, parce qu'alors le problème serait très grave».

Samedi après-midi, trois églises ont été la cible d’attaque à Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie, sans qu’aucune victime ne soit à déplorer. En Irak, une bombe a également explosé devant la porte d’une église de Bassorah, a-t-on appris dans la journée de samedi. Le groupe armé irakien Jaïch al-moujahidine a quant à lui menacé de frapper l’Italie et le Vatican, en riposte aux propos du Pape. Selon le quotidien Corriere della Sera, le niveau de vigilance antiterroriste a même été relevé au Vatican.

Dans la semaine, c’est une véritable avalanche de condamnations des plus hautes sommités religieuses de l'islam et des dirigeants politiques musulmans qui a déferlé. Le cheikh d'Al-Azhar au Caire, la plus haute autorité de l'islam sunnite dans le monde, s'était en effet déclaré «indigné» des propos du Pape. Tout comme l'Association des oulémas algériens, qui s’était dite «choquée».

«Mensonge»

A l’unisson, le grand mufti, le plus haut dignitaire religieux d’Arabie Saoudite, n’a pas caché sa désapprobation en accusant le Pape de «mensonge». Un haut responsable de l'organisation islamique indonésienne Muhammadiyah a renchéri : «Quelles que soient les circonstances, en tant que Pape il n'aurait pas dû dire de telles choses».

Les dirigeants politiques de pays musulmans ont également joint leurs voix au flot de critiques. Dès vendredi, les monarchies pétrolières du Conseil de coopération du Golfe (Arabie Saoudite, Emirats arabes unis, Koweït, Qatar, Bahreïn et Oman) ont réclamé «des excuses claires et franches» du Pape pour ses propos «préjudiciables à l'islam et au prophète Mahomet». Elles ont été suivies par le Parlement égyptien et par le premier ministre malaisien Abdullah Ahmad Badawi.

L'Iran, par la voix de son ministère des Affaires étrangères, a également appelé le Pape à «réexaminer rapidement ses propos et à les corriger». L'église copte égyptienne, une église chrétienne orthodoxe, a même rejeté les propos de Benoît XVI et «toute atteinte aux symboles musulmans». Des propos qui, enfin, on été critiqués jusque dans la presse américaine, le New York Times les qualifiant de «tragiques et dangereux».

Merkel à la rescousse

Cependant quelques voix se sont élevées en Europe pour prendre la défense de Benoît XVI. «Celui qui critique le pape méconnaît l'intention de son discours qui était d'inviter au dialogue entre les religions», a affirmé samedi la chancelière allemande et compatriote du Pape, Angela Merkel.

En Autriche, un pays très catholique, de nombreux journaux ont volé au secours du Pape. «Le soulèvement réflexe d'une partie du monde musulman s'explique par un raccourci volontaire du discours du Pape et une ignorance de sa véritable intention», a écrit ainsi le quotidien indépendant Kurier.
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