Le pape va trop bien pour l'opinion italienne
L'optimisme forcené du Vatican et les bulletins de santé laconiques finissent par alimenter la suspicion.
Par ERIC JOZSEF
jeudi 03 février 2005 (Liberation.fr - 18:02)
Rome, de notre correspondant
ransporté d'urgence mardi soir à la polyclinique Gemelli de Rome pour une laryngo-trachéite aiguë, Jean Paul II devrait rester hospitalisé au moins une semaine. Les bulletins de santé distillés par le Vatican parlent d'«une évolution positive des conditions générales et respiratoires du souverain pontife» et le porte-parole du Saint-Siège, Joaquin Navarro Valls, explique : «Mon expérience personnelle quand j'ai eu la grippe est que cela dure sept jours ou une semaine, à vous de choisir.»
Tous les rendez-vous du pape jusqu'à dimanche ont été annulés. Ceux de la semaine prochaine sont en suspens. Les cérémonies de dimanche devraient être un test de la santé réelle du pape. Hier, le quotidien de la Conférence épiscopale «Avvenire» laissait entendre que «le pape Wojtyla devrait comme toujours, dimanche à midi, guider la récitation de l'Angélus. De l'hôpital Gemelli ou de la place Saint-Pierre ? Il est trop tôt pour le dire».
Jeudi après-midi, l'agence italienne Ansa, citant des sources au Vatican, annonçait que le pape pourrait faire samedi sa première déclaration depuis son hospitalisation, dans une liaison vidéo avec des séminaristes romains en direct de sa chambre d'hôpital.
Au lieu de rassurer l'opinion publique, cet optimisme forcené finit par alimenter toutes les suspicions. Au point que le cardinal Sergio Sebastiani, «ministre de l'Economie» du Vatican, a cru bon de préciser dans le quotidien «La Repubblica» : «Il n'y a rien à cacher. On n'agit pas comme dans l'ex-URSS lorsque, devant l'évidence, les autorités niaient les maladies des gouvernants, même s'ils étaient déjà morts.» Reste que les bulletins de santé délivrés par le Saint-Siège sont laconiques et personne ne se hasarde à prévoir les conséquences de cette nouvelle maladie, notamment sur l'élocution déjà réduite de Jean Paul II.
Les différentes personnalités qui se sont rendues mercredi à l'hôpital Gemelli, du maire de Rome Walter Veltroni au ministre de la Santé Girolamo Sirchia — lequel a étrangement précisé que «les bulletins de santé reflètent la vérité» —, n'ont pu pénétrer dans la chambre du pape, étroitement surveillée par Mgr Stanislaw Dziwisc, le fidèle secrétaire de Jean Paul II, qui se relaie nuit et jour avec un autre prélat polonais au chevet du chef de l'Eglise catholique.
Le secrétaire d'Etat au Vatican, Angelo Sodano, qui fait figure de Premier ministre au sein de la curie et l'une des seules personnes autorisées à accéder au dixième étage de la polyclinique, s'est, lui aussi, voulu rassurant. «J'espère que tout se résoudra en quelques jours», a-t-il indiqué le très influent préfet pour la Congrégation de la doctrine de la foi, Joseph Ratzinger, véritable autorité morale et institutionnelle au Vatican, Angelo Sodano est officiellement l'homme qui assure l'intérim.
Au Saint-Siège, déjà bien rodé aux absences de Karol Wojtyla, on assure que la curie fonctionne à peu près normalement, même en l'absence du grand patron. A la question «Qui commande au Vatican lorsque le pape est à l'hôpital ?» Joaquin Navarro Valls avait par le passé sèchement répondu : «Au Vatican, il n'y a pas de valise nucléaire dont quelqu'un doit avoir la clé à tout moment. Les décisions prises par un pape peuvent attendre son retour de l'hôpital.»
Sodano est habilité à régler toutes les questions concernant la gestion quotidienne de la curie. Mais il ne peut prendre de mesures concernant l'Eglise dans son ensemble ni procéder à des nominations. Mercredi, l'entourage du pape avait fait savoir que Jean Paul II avait, de son lit d'hôpital, continué à travailler. Un communiqué du Vatican indiquait même qu'il avait procédé à la désignation de nouveaux évêques. En réalité, le pape avait effectué ces nominations avant l'aggravation de son état de santé.
Par ERIC JOZSEF
jeudi 03 février 2005 (Liberation.fr - 18:02)
Rome, de notre correspondant
ransporté d'urgence mardi soir à la polyclinique Gemelli de Rome pour une laryngo-trachéite aiguë, Jean Paul II devrait rester hospitalisé au moins une semaine. Les bulletins de santé distillés par le Vatican parlent d'«une évolution positive des conditions générales et respiratoires du souverain pontife» et le porte-parole du Saint-Siège, Joaquin Navarro Valls, explique : «Mon expérience personnelle quand j'ai eu la grippe est que cela dure sept jours ou une semaine, à vous de choisir.»
Tous les rendez-vous du pape jusqu'à dimanche ont été annulés. Ceux de la semaine prochaine sont en suspens. Les cérémonies de dimanche devraient être un test de la santé réelle du pape. Hier, le quotidien de la Conférence épiscopale «Avvenire» laissait entendre que «le pape Wojtyla devrait comme toujours, dimanche à midi, guider la récitation de l'Angélus. De l'hôpital Gemelli ou de la place Saint-Pierre ? Il est trop tôt pour le dire».
Jeudi après-midi, l'agence italienne Ansa, citant des sources au Vatican, annonçait que le pape pourrait faire samedi sa première déclaration depuis son hospitalisation, dans une liaison vidéo avec des séminaristes romains en direct de sa chambre d'hôpital.
Au lieu de rassurer l'opinion publique, cet optimisme forcené finit par alimenter toutes les suspicions. Au point que le cardinal Sergio Sebastiani, «ministre de l'Economie» du Vatican, a cru bon de préciser dans le quotidien «La Repubblica» : «Il n'y a rien à cacher. On n'agit pas comme dans l'ex-URSS lorsque, devant l'évidence, les autorités niaient les maladies des gouvernants, même s'ils étaient déjà morts.» Reste que les bulletins de santé délivrés par le Saint-Siège sont laconiques et personne ne se hasarde à prévoir les conséquences de cette nouvelle maladie, notamment sur l'élocution déjà réduite de Jean Paul II.
Les différentes personnalités qui se sont rendues mercredi à l'hôpital Gemelli, du maire de Rome Walter Veltroni au ministre de la Santé Girolamo Sirchia — lequel a étrangement précisé que «les bulletins de santé reflètent la vérité» —, n'ont pu pénétrer dans la chambre du pape, étroitement surveillée par Mgr Stanislaw Dziwisc, le fidèle secrétaire de Jean Paul II, qui se relaie nuit et jour avec un autre prélat polonais au chevet du chef de l'Eglise catholique.
Le secrétaire d'Etat au Vatican, Angelo Sodano, qui fait figure de Premier ministre au sein de la curie et l'une des seules personnes autorisées à accéder au dixième étage de la polyclinique, s'est, lui aussi, voulu rassurant. «J'espère que tout se résoudra en quelques jours», a-t-il indiqué le très influent préfet pour la Congrégation de la doctrine de la foi, Joseph Ratzinger, véritable autorité morale et institutionnelle au Vatican, Angelo Sodano est officiellement l'homme qui assure l'intérim.
Au Saint-Siège, déjà bien rodé aux absences de Karol Wojtyla, on assure que la curie fonctionne à peu près normalement, même en l'absence du grand patron. A la question «Qui commande au Vatican lorsque le pape est à l'hôpital ?» Joaquin Navarro Valls avait par le passé sèchement répondu : «Au Vatican, il n'y a pas de valise nucléaire dont quelqu'un doit avoir la clé à tout moment. Les décisions prises par un pape peuvent attendre son retour de l'hôpital.»
Sodano est habilité à régler toutes les questions concernant la gestion quotidienne de la curie. Mais il ne peut prendre de mesures concernant l'Eglise dans son ensemble ni procéder à des nominations. Mercredi, l'entourage du pape avait fait savoir que Jean Paul II avait, de son lit d'hôpital, continué à travailler. Un communiqué du Vatican indiquait même qu'il avait procédé à la désignation de nouveaux évêques. En réalité, le pape avait effectué ces nominations avant l'aggravation de son état de santé.
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