2.03.2005

«Que Dieu tout-puissant lui donne la force»

La foule s'efforçait de glaner des nouvelles hier devant l'hôpital Gemelli

Rome : Richard Heuzé
[LE FIGARO, 03 février 2005]

Sur les hauteurs de Monte Mario, au nord-ouest de la capitale, l'hôpital universitaire Gemelli méritait bien hier matin son surnom de «Vatican III», après Saint-Pierre et Castel Gandolfo. L'établissement, inauguré en 1954 au nom d'un frère franciscain fondateur trente ans auparavant de l'université du Sacré-Coeur dont il dépend, est redevenu lieu de pèlerinage.
Dehors les visiteurs scrutent avec inquiétude le petit appartement du dixième et dernier étage où le Pape est soigné. Des batteries de caméras de télévision installées sur un terre-plein braquent en permanence les stores fermés. Une lumière tamisée a filtré toute la nuit.
Preuve de l'attention qui entoure le Saint-Père. «Cette lumière, ce mystère qui entourait l'état de santé du Pape, ces docteurs qui nous demandaient de ne pas poser trop de questions, tout cela était impressionnant», confie l'écrivain Alain Elkann, l'un des premiers accourus sur place.
Au petit matin, malades et visiteurs apprennent des journalistes et des cameramen contenus à grand-peine par les carabiniers la nouvelle hospitalisation de Jean-Paul II, la septième au Gemelli depuis le début de son pontificat. Dans le hall d'entrée, le bulletin médical de la matinée est lu sous une sculpture en bois clair implorant la Trinité de «soutenir l'homme dans sa souffrance».
Dans le public, réactions de crainte et de compassion : «Ô Bonne Mère ! Que la Sainte Vierge lui vienne en aide !», s'écrie Rosaria, la soixantaine passée, en chaussons et robe de chambre, à peine remise d'une opération. «Que Dieu tout-puissant lui donne la force de poursuivre sa mission de paix», proclament trois missionnaires. «Un personnage si beau, si noble... Il a été un si grand Pape !» ajoute Donatella, qui accompagne son mari malade. Avant de se reprendre : «C'est un grand pape, le plus grand du XXesiècle.»
Les bras chargés d'une brassée de roses, une religieuse fend la foule pour les remettre à un agent de sécurité. L'ascenseur menant au 10e étage est interdit au public. Seul Walter Veltroni, le maire de Rome, pourra l'emprunter.
Dix minutes d'entretien avec le porte-parole du Vatican Joachim Navarro-Vals, dans l'antichambre du saint-père, qui est aussi le chef spirituel de la Ville éternelle. Le temps de lui transmettre, «au nom de tous les Romains», un billet souhaitant sa prompte guérison. Le ministre de la Santé Joachim Sirchia, un médecin catholique très pratiquant, lui succède dans l'après-midi. Silvio Berlusconi, tenu informé dès la veille à minuit, fait savoir qu'il reste en étroit contact avec la secrétairerie d'Etat du Vatican. «Nous sommes raisonnablement tranquilles. Son état n'inspire pas de préoccupation particulière», déclare le numéro deux du gouvernement, Gianfranco Fini.
A cette heure matinale, le bar de l'hôpital est noir de monde. La librairie expose des ouvrages d'art sur les papes. Si la belle chapelle en sous-sol dédiée à saint François d'Assise est vide, elle ne devrait pas le rester longtemps.
Le cardinal Camillo Ruini, président de la Conférence épiscopale, a convié tous les croyants à réciter des prières spéciales pour le Saint-Père.
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