2.03.2005

Le risque d'une «grippe maligne»

Catherine Petitnicolas
[03 février 2005]


Déjà très affaibli par sa maladie de Parkinson et son mauvais état général, Jean Paul II, 84 ans, a dû être hospitalisé mardi soir au département des urgences de l'hôpital Gemelli, à la suite d'une mauvaise grippe, et placé sous assistance respiratoire. En raison «d'une laryngo-trachéite aiguë avec des épisodes de laryngospasmes», selon le communiqué officiel. Autrement dit, une gêne respiratoire brutale provoquée par une contraction sévère des muscles du larynx qui contrôlent le passage de l'air vers les poumons, entraînant l'obstruction du conduit aérien et un risque de suffocation.
Pour le Dr Marc Ziegler, neurologue spécialiste de la maladie de Parkinson à l'hôpital Léopold-Bellan à Paris, «chez un malade parkinsonien, les troubles du carrefour laryngo-pharyngé sont toujours préoccupants. Pour plusieurs raisons : d'une part les anomalies de la déglutition peuvent se compliquer d'infections respiratoires secondaires, d'autre part les réflexes de la toux, beaucoup moins efficaces chez un tel patient et les perturbations des sécrétions bronchiques ne facilitent guère le drainage des bronches.» Sans oublier qu'il existe aussi une faiblesse de l'amplitude respiratoire liée à l'akinésie (diminution des mouvements) des muscles thoraciques liée à la maladie de Parkinson, qui ne facilite guère un bon fonctionnement de l'appareil respiratoire. Tout cela, s'ajoutant à l'extrême gravité du laryngospasme, expliquerait pourquoi il a fallu mettre le Pape sous assistance respiratoire.
«Au cours de la nuit passée, se sont poursuivies les thérapies d'assistance à la respiration qui ont permis la stabilisation de l'état clinique», a confirmé hier à la mi-journée Joaquin Navarro-Valls, le porte-parole du Vatican. «Les paramètres cardio-respiratoires et métaboliques sont, actuellement, dans les limites de la normale», a-t-il précisé. Ce qui signifie que l'éventualité d'une grippe maligne, liée à une attaque plus sévère du virus et provocant une complication particulièrement difficile à enrayer, puisse être écartée. Du moins pour le moment.
Interrogé sur les interventions pratiquées sur le patient illustre, le porte-parole du Vatican, rompu à la communication médicale (il est diplômé en médecine) a formellement démenti toute trachéotomie, une ouverture chirurgicale de la trachée, mise en place lors d'une ventilation respiratoire assistée prolongée. «Le Souverain Pontife restera encore plusieurs jours à l'hôpital mais ce seront naturellement les médecins qui décideront de la durée de son hospitalisation», a déclaré prudemment Joaquin Navarro-Valls sur Radio Vatican, soulignant néanmoins «qu'il n'y a aucune raison de s'alarmer».
Pour sa part, le Dr Ziegler estime «qu'une telle complication n'est pas de très bon pronostic, même s'il est difficile de se prononcer car un parkinsonien peut voir son état s'aggraver très vite mais également récupérer tout aussi rapidement.» «Tout dépend aussi de l'efficacité de son traitement antiparkinsonien (en principe à base de L-Dopa) tout au long de la journée», analyse-t-il. Ce qui n'est pas toujours facile à maîtriser car la L-Dopa a une demi-vie très courte, avec le risque de surdoser ou de sous-doser le patient.» En cas de sous-dosage et donc de moindre efficacité du traitement, l'akinésie respiratoire augmente et menace la qualité des mouvements respiratoires.
Le pronostic dépend également de l'état infectieux sous-jacent et des ressources physiques et immunologiques de Jean Paul II, pour les combattre. Mais les spécialistes de virologie et de gériatrie savent bien qu'une infection grippale chez les personnes âgées peut se compliquer, surtout si elles souffrent déjà d'une pathologie chronique.


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