Dans une lettre aux évêques français, le pape fait l'éloge de la loi de 1905
LE MONDE | 12.02.05
Le pape, qui, au moment de la polémique sur le port des signes religieux à l'école, avait vigoureusement mis en garde la France contre tout "laïcisme", s'invite à nouveau dans le débat national sur la loi de 1905 de séparation de l'Eglise et de l'Etat, un siècle après son vote. Samedi 12 février, il a rendu publique une lettre de sept pages adressée aux évêques de France pour que ceux-ci mesurent le chemin parcouru depuis. Il les appelle à résister à toute marginalisation du fait religieux.
La loi de 1905 a été "un événement douloureux et traumatisant pour l'Eglise de France", rappelle Jean Paul II. Mais le "processus de pacification", engagé par l'Eglise comme par l'Etat, a permis d'aboutir à "une meilleure compréhension de la laïcité". "Cette paix est désormais une réalité à laquelle le peuple français est profondément attaché", souligne le pape.
Il souhaite en particulier que la commission de dialogue entre l'Eglise catholique et l'Etat, mise en place par Lionel Jospin en février 2002 et reconduite par Jean-Pierre Raffarin, soit davantage reconnue et active. En citant Jacques et Raïssa Maritain, Mounier, Bernanos, Robert Schuman, Michelet et bien d'autres, Jean Paul II évoque longuement le rôle joué par les catholiques dans la culture française. Il les appelle à reprendre toute leur place dans le débat intellectuel et politique.
"La crise des valeurs et le manque d'espérance que l'on constate en France font partie de la crise d'identité que traversent les sociétés modernes, qui ne proposent qu'une vie fondée sur le bien-être matériel(...). L'Eglise souhaite que les valeurs religieuses, morales et spirituelles qui font partie du patrimoine de la France, qui ont façonné son identité, ne tombent pas dans l'oubli."
PAS DE "REPLI SECTAIRE"
Revenant sur les polémiques autour de la religion, le pape demande encore qu'"au lieu de se situer en antagonismes les forces sociales soient toujours plus au service de l'ensemble de la population (...) dans le contexte pluriethnique, multiculturel et multiconfessionnel" qui est celui de la France aujourd'hui. Ce respect mutuel, ajoute-t-il, permettra d'éviter que les religions "ne se réfugient dans un sectarisme qui pourrait représenter un danger pour l'Etat lui-même".
"La société doit pouvoir admettre que des personnes, dans le respect d'autrui et des lois de la République, puissent faire état de leur appartenance religieuse, poursuit-il. Dans le cas contraire, on court toujours le risque d'un repliement identitaire et sectaire."
Jean Paul II revendique encore le droit pour les chrétiens de "prendre la parole publiquement pour exprimer leurs opinions et manifester leurs convictions". "C'est à ce prix que la laïcité, loin d'être le lieu d'un affrontement, est l'espace pour un dialogue constructif, dans l'esprit des valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité."
Dans son adresse aux évêques français, le pape conclut : "Que tous vos compatriotes sachent que les membres de la communauté catholique souhaitent vivre leur foi au milieu de leurs frères et sœurs et mettre à la disposition de tous leurs compétences et talents. Que personne n'ait peur de la démarche religieuse de personnes et de groupes sociaux. Vécue dans le respect de la saine laïcité, elle ne peut qu'être source de dynamisme et de promotion pour l'homme."
Henri Tincq
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 13.02.05
Le pape, qui, au moment de la polémique sur le port des signes religieux à l'école, avait vigoureusement mis en garde la France contre tout "laïcisme", s'invite à nouveau dans le débat national sur la loi de 1905 de séparation de l'Eglise et de l'Etat, un siècle après son vote. Samedi 12 février, il a rendu publique une lettre de sept pages adressée aux évêques de France pour que ceux-ci mesurent le chemin parcouru depuis. Il les appelle à résister à toute marginalisation du fait religieux.
La loi de 1905 a été "un événement douloureux et traumatisant pour l'Eglise de France", rappelle Jean Paul II. Mais le "processus de pacification", engagé par l'Eglise comme par l'Etat, a permis d'aboutir à "une meilleure compréhension de la laïcité". "Cette paix est désormais une réalité à laquelle le peuple français est profondément attaché", souligne le pape.
Il souhaite en particulier que la commission de dialogue entre l'Eglise catholique et l'Etat, mise en place par Lionel Jospin en février 2002 et reconduite par Jean-Pierre Raffarin, soit davantage reconnue et active. En citant Jacques et Raïssa Maritain, Mounier, Bernanos, Robert Schuman, Michelet et bien d'autres, Jean Paul II évoque longuement le rôle joué par les catholiques dans la culture française. Il les appelle à reprendre toute leur place dans le débat intellectuel et politique.
"La crise des valeurs et le manque d'espérance que l'on constate en France font partie de la crise d'identité que traversent les sociétés modernes, qui ne proposent qu'une vie fondée sur le bien-être matériel(...). L'Eglise souhaite que les valeurs religieuses, morales et spirituelles qui font partie du patrimoine de la France, qui ont façonné son identité, ne tombent pas dans l'oubli."
PAS DE "REPLI SECTAIRE"
Revenant sur les polémiques autour de la religion, le pape demande encore qu'"au lieu de se situer en antagonismes les forces sociales soient toujours plus au service de l'ensemble de la population (...) dans le contexte pluriethnique, multiculturel et multiconfessionnel" qui est celui de la France aujourd'hui. Ce respect mutuel, ajoute-t-il, permettra d'éviter que les religions "ne se réfugient dans un sectarisme qui pourrait représenter un danger pour l'Etat lui-même".
"La société doit pouvoir admettre que des personnes, dans le respect d'autrui et des lois de la République, puissent faire état de leur appartenance religieuse, poursuit-il. Dans le cas contraire, on court toujours le risque d'un repliement identitaire et sectaire."
Jean Paul II revendique encore le droit pour les chrétiens de "prendre la parole publiquement pour exprimer leurs opinions et manifester leurs convictions". "C'est à ce prix que la laïcité, loin d'être le lieu d'un affrontement, est l'espace pour un dialogue constructif, dans l'esprit des valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité."
Dans son adresse aux évêques français, le pape conclut : "Que tous vos compatriotes sachent que les membres de la communauté catholique souhaitent vivre leur foi au milieu de leurs frères et sœurs et mettre à la disposition de tous leurs compétences et talents. Que personne n'ait peur de la démarche religieuse de personnes et de groupes sociaux. Vécue dans le respect de la saine laïcité, elle ne peut qu'être source de dynamisme et de promotion pour l'homme."
Henri Tincq
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 13.02.05
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