La Conférence épiscopale espagnole s'oppose aux mariages homosexuels
LE MONDE | 10.05.05 | 13h59 • Mis à jour le 10.05.05 | 13h59
Madrid correspondance
La hiérarchie de l'Eglise espagnole a lancé une attaque en règle contre le projet de loi autorisant le mariage homosexuel, adopté au Congrès des députés le 21 avril à Madrid. Alors que le débat sur la future loi, qui concerne aussi l'adoption, avait été quasi inexistant jusqu'à présent en Espagne, la Conférence épiscopale espagnole vient d'appeler les fonctionnaires à exercer leur "objection de conscience" pour ne pas avoir à célébrer de telles unions. Ce qui n'a pas manqué, cette fois, de faire polémique.
Les catholiques "ne peuvent pas se montrer indécis ni complaisants avec cette norme et doivent au contraire s'y opposer de façon claire et incisive", a insisté le comité exécutif de la Conférence épiscopale dans un communiqué publié vendredi 6 mai. Pour l'Eglise espagnole, encore très puissante malgré une image de plus en plus en décalage avec la société, le mariage homosexuel est contraire à la "morale" et à la "civilisation".
Le projet de loi promu par le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero "porte un grave préjudice aux valeurs fondamentales du mariage, de la famille, des jeunes et des éducateurs", selon les évêques. Aussi, dans leur document, les évêques invitaient-ils aussi les sénateurs catholiques à voter contre le projet de loi qui, s'il est adopté au Sénat fera de l'Espagne le troisième pays européen, après les Pays-Bas et la Belgique à autoriser les unions entre personnes de même sexe.
Cet appel a trouvé un écho chez au moins un des sénateurs socialistes. Mais les réactions contraires ne se sont pas fait attendre. A commencer par celles des associations de défense des homosexuels. La position de l'Eglise "délégitime gravement la démocratie et la souveraineté populaire" , dit Beatriz Gimeno de la Fédération nationale des lesbiennes, gays et transsexuels (Felgt). La Fondation Triangulo dénonce, elle, l'"intolérance" de l'Eglise, alors que le projet de loi est approuvé par une majorité des Espagnols, selon les sondages.
Mais les réactions sont également venues du gouvernement socialiste. La vice-présidente, Maria Teresa Fernandez de la Vega, s'est empressée de rappeler que, si le gouvernement "respecte" la position de l'Eglise, "ce sont le Congrès des députés et l'Etat qui légifèrent". Elle a également affirmé que les conseillers municipaux pourraient refuser de célébrer un mariage homosexuel si cela allait contre leurs principes, mais pas les fonctionnaires qui doivent "appliquer la loi".
"DES RÉALITÉS DISCTINCTES"
La position des évêques espagnols, qui avaient jusque-là publié et distribué des dépliants condamnant le mariage homosexuel, se calque sur celle du Vatican qui, par la bouche du président du Conseil pontifical pour la famille, le cardinal Alfonso Lopez Trujillo, avait le premier brandi l'arme de l'"objection de conscience" dans les cas de mariages homosexuels. Une poignée de maires conservateurs du Parti populaire (PP) avaient alors réagi en assurant qu'ils ne marieraient pas de couples homosexuels, contrairement à la plupart des dirigeants conservateurs des grandes capitales régionales, comme Valence ou Madrid, qui avaient fait savoir qu'ils respecteraient la loi.
Le projet de loi consiste à modifier des articles du code civil où les termes "mari" et "femme" vont être remplacés par "conjoints". Le PP, qui défendait plutôt une "union civile" entre personnes du même sexe, estime que c'est "une erreur" d'avoir gardé la notion de "mariage" pour les homosexuels. "On ne devrait pas utiliser les mêmes mots pour réguler des réalités distinctes (...) Je ne marierai pas les couples homosexuels", avait dit Ana Botella, conseillère à Madrid connue pour son militantisme catholique et femme de l'ancien chef du gouvernement, José Maria Aznar. Ce à quoi un militant des droits homosexuels avait répondu publiquement que Mme Botella avait mal compris, ajoutant : "C'est moi qui ne veux pas qu'elle me marie." -
Article paru dans l'édition du 11.05.05
Madrid correspondance
La hiérarchie de l'Eglise espagnole a lancé une attaque en règle contre le projet de loi autorisant le mariage homosexuel, adopté au Congrès des députés le 21 avril à Madrid. Alors que le débat sur la future loi, qui concerne aussi l'adoption, avait été quasi inexistant jusqu'à présent en Espagne, la Conférence épiscopale espagnole vient d'appeler les fonctionnaires à exercer leur "objection de conscience" pour ne pas avoir à célébrer de telles unions. Ce qui n'a pas manqué, cette fois, de faire polémique.
Les catholiques "ne peuvent pas se montrer indécis ni complaisants avec cette norme et doivent au contraire s'y opposer de façon claire et incisive", a insisté le comité exécutif de la Conférence épiscopale dans un communiqué publié vendredi 6 mai. Pour l'Eglise espagnole, encore très puissante malgré une image de plus en plus en décalage avec la société, le mariage homosexuel est contraire à la "morale" et à la "civilisation".
Le projet de loi promu par le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero "porte un grave préjudice aux valeurs fondamentales du mariage, de la famille, des jeunes et des éducateurs", selon les évêques. Aussi, dans leur document, les évêques invitaient-ils aussi les sénateurs catholiques à voter contre le projet de loi qui, s'il est adopté au Sénat fera de l'Espagne le troisième pays européen, après les Pays-Bas et la Belgique à autoriser les unions entre personnes de même sexe.
Cet appel a trouvé un écho chez au moins un des sénateurs socialistes. Mais les réactions contraires ne se sont pas fait attendre. A commencer par celles des associations de défense des homosexuels. La position de l'Eglise "délégitime gravement la démocratie et la souveraineté populaire" , dit Beatriz Gimeno de la Fédération nationale des lesbiennes, gays et transsexuels (Felgt). La Fondation Triangulo dénonce, elle, l'"intolérance" de l'Eglise, alors que le projet de loi est approuvé par une majorité des Espagnols, selon les sondages.
Mais les réactions sont également venues du gouvernement socialiste. La vice-présidente, Maria Teresa Fernandez de la Vega, s'est empressée de rappeler que, si le gouvernement "respecte" la position de l'Eglise, "ce sont le Congrès des députés et l'Etat qui légifèrent". Elle a également affirmé que les conseillers municipaux pourraient refuser de célébrer un mariage homosexuel si cela allait contre leurs principes, mais pas les fonctionnaires qui doivent "appliquer la loi".
"DES RÉALITÉS DISCTINCTES"
La position des évêques espagnols, qui avaient jusque-là publié et distribué des dépliants condamnant le mariage homosexuel, se calque sur celle du Vatican qui, par la bouche du président du Conseil pontifical pour la famille, le cardinal Alfonso Lopez Trujillo, avait le premier brandi l'arme de l'"objection de conscience" dans les cas de mariages homosexuels. Une poignée de maires conservateurs du Parti populaire (PP) avaient alors réagi en assurant qu'ils ne marieraient pas de couples homosexuels, contrairement à la plupart des dirigeants conservateurs des grandes capitales régionales, comme Valence ou Madrid, qui avaient fait savoir qu'ils respecteraient la loi.
Le projet de loi consiste à modifier des articles du code civil où les termes "mari" et "femme" vont être remplacés par "conjoints". Le PP, qui défendait plutôt une "union civile" entre personnes du même sexe, estime que c'est "une erreur" d'avoir gardé la notion de "mariage" pour les homosexuels. "On ne devrait pas utiliser les mêmes mots pour réguler des réalités distinctes (...) Je ne marierai pas les couples homosexuels", avait dit Ana Botella, conseillère à Madrid connue pour son militantisme catholique et femme de l'ancien chef du gouvernement, José Maria Aznar. Ce à quoi un militant des droits homosexuels avait répondu publiquement que Mme Botella avait mal compris, ajoutant : "C'est moi qui ne veux pas qu'elle me marie." -
Article paru dans l'édition du 11.05.05
<< Home