8.25.2005

Sharon, Rocard et Benoît XVI...

Semaine du jeudi 25 août 2005 - n°2129 - Chroniques
L’éditorial de Jean Daniel

1. C’est une chance que le pape soit allemand

On me pardonnera de parler d’autres événements que de la publication du livre de Michel Houellebecq. Je n’ai rien contre l’auteur, mais cette rentrée a lieu sous le signe de Benoît XVI et de son voyage à Cologne, de l’évacuation des colons israéliens de Gaza et de la crise du Parti socialiste français menacé d’implosion.
Deux textes paraissent destinés à faire référence, en dehors du discours du pape: celui de Michel Rocard dans «le Nouvel Observateur» et celui d’Avraham Burg, ancien président du Parlement israélien, dans «le Monde» daté du 18 août. J’y reviendrai. Je commencerai en observant qu’avec son voyage plébiscitaire en Allemagne et sa visite à cette grande synagogue de Cologne qui avait été détruite pendant la Nuit de Cristal en 1938 le cardinal allemand Josef Ratzinger, devenu Benoît XVI, a donné un éclat nouveau aux actes de repentance initiés par Jean-Paul II, dont il a approfondi le sens. Parmi le million de jeunes fidèles qui l’ont consacré, certains ont pu déplorer que, comme son prédécesseur, le nouveau pape condamne l’avortement, l’utilisation du préservatif, et qu’il s’oppose à l’euthanasie, à la fécondation assistée et à l’homosexualité. Faut-il se résigner à mettre ce conservatisme sectaire sur le compte de la fonction pontificale? En tout cas, un cardinal s’est soucié de demander qu’à propos de l’utilisation du préservatif dans ce continent africain si terriblement meurtri par le sida on donne du temps au souverain pontife. Evoquant l’antisémitisme chrétien, Benoît XVI, avec solennité et chaleur, a confirmé le désir de réconciliation de l’Eglise catholique avec la tradition israélite. Il a ainsi, comme le souligne le cardinal Lustiger, procuré à la patrie des philosophes et des musiciens l’occasion de porter plus légèrement le poids accablant de ses péchés. Pour ce qui est des actes de repentance, rappelons qu’ils ont été décidés par Jean-Paul II dans une quasi-solitude. Dans le souci, entre autres, de ménager les chrétiens d’Orient – qui sont pour une part arabes et palestiniens–, le Sacré Collège avait en effet manifesté une ombrageuse résistance. Jean-Paul II ne trouvant d’aide véritable que chez quelques cardinaux comme le Français Mgr Etchegaray et l’Italien Mgr Martini. A vrai dire, s’il n’avait été allemand d’origine, Benoît XVI n’eût probablement pas estimé indispensable de revenir sur le pardon demandé à Dieu pour Auschwitz. Il eût trouvé sans doute que Jean XXIII et Jean-Paul II avaient assez donné. C’est donc bien curieusement une chance que le nouveau pape élu ait été un Allemand. (...)
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