3.26.2005

Espérance de Pâques et désenchantement de l’Europe

analyse

LE MONDE | 26.03.05 | 14h32 • Mis à jour le 26.03.05 | 14h32

Pâques est une fête joyeuse. Deux milliards de chrétiens vont célébrer dimanche 27 mars (le 1er mai pour les Eglises orthodoxes qui n’ont pas le même calendrier) la résurrection de Jésus-Christ, Dieu fait homme, défi aux lois de la biologie et de la raison, mais pilier de la foi chrétienne. "Si Dieu n’est pas ressuscité, vaine est ma foi", clamait l’apôtre Paul aux païens d’Athènes. Empruntée aux mythes les plus anciens de l’humanité, la croyance en la résurrection signifie, pour les chrétiens, que la mort n’a pas forcément le dernier mot, que Dieu est le créateur et le maître de la vie et qu’il y a toujours un au-delà de l’histoire.
Pour les catholiques, cette fête de Pâques 2005 aura toutefois un goût de tristesse. Ils n’ignorent pas que le pape Jean Paul II arrive au bout de sa course. Pendant plus d’un quart de siècle, par ses voyages, ses gestes, ses messages, il aura tenté de défendre cette "culture de la vie" contre l’envahissante " culture de la mort" et de raviver le feu de l’espérance de Pâques. Il devrait le faire une fois de plus ce dimanche avec les maigres forces qui l’animent encore.
Au milieu des clameurs du référendum sur l’Europe, sur son identité et les valeurs qu’elle propose, l’observation que ce pape faisait en l’an 2000 à Rome, devant une assemblée d’évêques européens, ne peut laisser personne indifférent : "Pour la première fois de l’histoire de l’humanité, affirmait-il, il y a un homme qui vit comme si Dieu n’existait pas, c’est l’homme européen." Typique de cet affaissement de la culture croyante, un sondage vient de révéler à Londres que moins de la moitié de la population britannique était capable de faire le lien entre la fête de Pâques et la résurrection de Jésus-Christ ! L’Europe n’a pas le monopole de ce "désenchantement".
Mais de plus en plus d’observateurs soulignent combien, face au monde musulman, traversé par des tensions identitaires, et au monde protestant américain (du Nord), marqué par un conservatisme dur, mais qui ose encore affirmer des valeurs transcendantes, la vieille terre chrétienne de l’Europe peine à faire entendre sa voix, à raviver son héritage, à afficher sa différence. A l’heure du bilan, ce sera l’une des plus cruelles désillusions du Polonais Karol Wojtyla. La "nouvelle évangélisation" de l’Europe n’a pas atteint son but. Le glas du communisme à l’Est n’a pas été suivi d’un sursaut spirituel, dont le pape espérait qu’il soit contagieux à l’Ouest.
S’il fallait une preuve supplémentaire de l’épuisement de la foi en Europe, il faudrait la chercher dans le succès de pamphlets - livres et articles - visant la religion, surtout les religions monothéistes, sans souci des distinctions qu’imposent, pour chacune d’elles, l’histoire, les dogmes, les doctrines, les pratiques, le système d’autorité. S’y ajoute l’engouement pour les religiosités parallèles, l’ésotérisme et les "bricolages" de croyances dans lesquels le pragmatisme, la tolérance, l’expérience intime l’emportent toujours sur les dogmes et les vérités révélées.
Des preuves ? Sans doute ne peut-on confondre la qualité d’une oeuvre littéraire avec son chiffre de diffusion et son retentissement médiatique. Mais on doit constater que les meilleures ventes de ces derniers mois en France sont celles du philosophe Michel Onfray, auteur d’un Traité d’athéologie (Grasset) qui se présente comme nietzschéen et hédoniste, réglant des comptes avec l’institution catholique dont il fut longtemps le salarié (dans l’enseignement privé), et d’un auteur de romans à suspense, l’Américain Dan Brown, avec Anges et démons et surtout Da Vinci Code : 42 traductions et 20 millions d’exemplaires vendus dans le monde en six mois.
La méthode de Brown consiste à " présenter des contrevérités comme des réalités historiques, ce qui est le propre de la contrefaçon", commente Jean Chélini dans la revue Historia consacrée à ce phénomène d’édition. Ce faisant, Brown réveille la fascination, vieille comme l’humanité, pour le dévoilement des complots et des mystères, les rites initiatiques, la "révélation" de vérités prétendument cachées par les Eglises, les sociétés secrètes, la franc-maçonnerie, etc.

SOIF DE SYMBOLES

Autrement dit, si la religion est évacuée de l’Europe, la religiosité surabonde, comme le disait un responsable catholique mécontent du rejet de la mention du christianisme par les rédacteurs de la Constitution européenne dans les héritages du Vieux Continent. Cette religiosité va des pratiques de superstition (voyance, astrologie, cartomancie) à la curiosité pour les traditions parallèles, les vérités cachées par les Evangiles apocryphes, soit le fonds de commerce du Da Vinci Code. Ces pratiques magico-religieuses ont en commun de rejeter la figure de l’autorité cléricale, normative et prescriptive, de préférer le "maître spirituel" aux doctrines et le travail sur soi à la sacralisation de l’histoire et autres utopies croyantes.


L’écho de ces croyances parallèles et des attaques contre les religions, identifiées sous certaines plumes (Salman Rushdie, Michel Onfray) comme la forme moderne du totalitarisme, du bellicisme et de la manipulation des consciences, déconcerte les institutions religieuses. Le succès de Da Vinci Code est le symptôme d’une culture moderne malade, entend-on à Rome. "Le roman à suspense devient prétexte à un dévoilement de fausses preuves, toutes à charge contre l’Eglise", se plaint Mgr Jean-Michel di Falco, chargé des questions de communication de l’épiscopat français.
Le risque est celui du repli sur soi, du "communautarisme" religieux maintes fois et légitimement dénoncé. Les catholiques eux-mêmes n’en sont pas à l’abri, si l’on en juge, entre autres, par l’attaque en justice de l’épiscopat contre l’affiche publicitaire de Marithé et François Girbaud qui touchait, il est vrai, au sacrement de l’Eucharistie, centre de la liturgie chrétienne. "Les Eglises peinent à accepter leur sort de minorités", convient Jean-François Colosimo, professeur à l’Institut orthodoxe Saint-Serge, à Paris.
Mais ceux qui sourient en entendant parler de Résurrection ne sont-ils pas souvent les mêmes qui, le matin dans leur journal, vont consulter leur horoscope ? L’actuelle religiosité diffuse montre que cette Europe qui a pris son parti de la sécularisation, de la laïcisation, c’est-à-dire la fin de l’emprise de la religion sur ses moeurs ou sa politique, est à la recherche de signes, de symboles, de rites et de toutes ces formes de "réenchantement du monde" pour plagier la célèbre formule du philosophe Marcel Gauchet.
Dans son Manifeste d’une génération sans port, que viennent de publier les Presses de la Renaissance, le jeune auteur Denis Rousset, 29 ans, instruit le procès d’une génération de parents qui n’auraient pas su transmettre à leurs enfants de patrimoine moral et spirituel, de peur de nuire à leur liberté. "Ironie de l’histoire, écrit-il, cette génération, qui est la seule à avoir eu le pouvoir d’être maîtresse de sa vie, de l’avoir pensé, de l’avoir osé, offre l’exemple de l’impuissance à pouvoir prendre les décisions nécessaires à la survie de sa progéniture."
Henri Tincq
Article paru dans l’édition du 27.03.05

Jean-Paul II bénit le prince Rainier

LCN 26/03/2005 10h20

Monaco

(D'après PC) - Le pape Jean-Paul II a adressé une «bénédiction apostolique» au prince Rainier III de Monaco et à ses proches dans un message rendu public par le Vatican.

«Informé de l'épreuve de santé qui frappe Votre Altesse Sérénissime, le Saint-Père s'unit à Elle par la pensée et par la prière formant des voeux chaleureux à son intention», précise le message du Vatican.
«La confiant à l'intercession de la Vierge Marie, le pape demande au Seigneur de lui donner le réconfort et le soutien de sa grâce, et il Lui accorde de grand coeur une particulière bénédiction apostolique ainsi qu'à ses proches», poursuit le texte, diffusé par le cardinal Angelo Sodano, secrétaire d'État du Saint-Siège.
Âgé de 81 ans, le prince Rainier a été placé sous respirateur il y a trois jours, en raison d'une infection pulmonaire.

3.24.2005

A Rome, brève réapparition de Jean-Paul II

Il s'est montré au balcon sans parler, faisant taire les rumeurs sur sa mort.

Par Eric JOZSEF
jeudi 24 mars 2005

Rome de notre correspondant

près deux jours de rumeurs alarmantes sur son état de santé, le pape n'a fait hier qu'une très brève apparition à la fenêtre de ses appartements. Il est en effet resté moins d'une minute au balcon et n'a pu prononcer aucune parole. Visiblement très éprouvé, Jean-Paul II n'a adressé qu'un rapide salut aux pèlerins réunis place Saint-Pierre, à l'occasion de la traditionnelle audience du mercredi, et donné à la hâte sa bénédiction. Objet d'une trachéotomie le 24 février, le pape n'a plus parlé en public depuis sa sortie de la clinique Gemelli, le 13 mars. Depuis quelques jours, la presse italienne se fait l'écho d'une détérioration des conditions de santé du pape, âgé de 84 ans. Dimanche, Jean-Paul II était apparu très amaigri lors de la cérémonie des Rameaux. Certaines sources laissent entendre qu'il souffrirait d'anémie, ayant des difficultés à s'alimenter en raison de la canule insérée dans sa trachée. Mardi soir, l'agence Apcom indiquait que son état était préoccupant car «il réagirait mal» aux médicaments: «Il vomit en continu, il est faible et a de fortes migraines.» Selon certains, ce sont ces maux de tête qui expliqueraient le geste d'énervement du pape, qui, dimanche dernier, a violemment frappé son pupitre de la main après avoir béni la foule.
Dans ce contexte, le bruit a même couru lundi soir dans Rome que Jean-Paul II était décédé, provoquant la mobilisation des médias internationaux. La fausse nouvelle serait en réalité née de bribes de paroles entre deux gardes suisses saisies par un journaliste. La brève apparition d'hier a permis de faire taire la rumeur mais n'a pas éliminé toute inquiétude. Jean-Paul II devrait se montrer aux fidèles demain soir, vendredi saint, à l'occasion du chemin de croix mais uniquement à travers un écran vidéo. Pour la première fois de son pontificat, depuis 1978, il est exclu que le pape puisse se rendre au Colisée, où se déroule chaque année la cérémonie. Le prêtre polonais Konrad Hejmo a par ailleurs indiqué que, dimanche, Jean-Paul II ne donnera pas l'habituelle bénédiction pascale depuis la loggia de la basilique Saint-Pierre, trop exposée au vent, mais «depuis la fenêtre de son bureau».

 http://www.liberation.fr/page.php?Article=284747

Le pape, une fin de vie ordinaire

Rebonds

Le manque de transparence sur la santé de Jean-Paul II pose des questions essentielles.


Par Eric FAVEREAU
jeudi 24 mars 2005

Eric Favereau journaliste à Libération

On ne sait plus quoi dire, ni quoi penser des images que l'on nous donne à voir de Jean- Paul II. Et de sa fin de vie. Des images, comme venues d'un autre temps, d'un vieillard incapable de parler, que nul ne comprend, trimbalé de papamobile en chambre d'hôpital, à qui on fait en urgence une trachéotomie, puis que l'on voit bénir la foule derrière un micro. On ouvre une fenêtre, il prend froid. On le réhospitalise. Il tremble, peine à parler.
Quelle que soit la mise en scène voulue par le Vatican, une évidence s'impose : le pape est comme tout le monde et c'est l'exemple même d'une fin de vie d'aujourd'hui à laquelle on assiste. Une fin de vie hasardeuse, hésitante, incertaine. La mort médicalisée de la personne âgée est devenue ainsi. On ne sait plus trop. On ignore quand tout bascule. A quoi renvoient ces fins de vie ? Longtemps soigné, toujours vivant grâce à la médecine, le pape est un vieil homme de son temps. Avec un tableau clinique complexe. Ses médecins s'y perdent. «S'il attrapait un rhume, une grippe ou une infection pulmonaire, les besoins (en terme de soins) seraient accrus en raison des sécrétions plus importantes dans la poitrine et la canule», expliquait le Dr Khalid Ghuffoor, du Royal London Hospital, ajoutant : «La canule pourrait, à la longue, devenir source d'irritations et d'infections». D'autant que le pape pourrait devoir la garder à vie en raison de la maladie de Parkinson dont il est atteint. «La dégénérescence neurologique qu'elle engendre se traduit au niveau musculaire et ajoute aux difficultés respiratoires.»
Propos confus sur une situation où bien des questions restent en suspens : faut-il insister avec les techniques actuelles de respiration ? Lui donne-t-on des produits qui soulagent de la douleur, médicaments qui portent en eux le risque de hâter la fin ? Ou l'inverse ? Au risque de le laisser mourir, peu à peu, étouffé. Les communiqués des médecins sont grotesques, au moins autant que ceux pondus par les médecins de Mitterrand. On ment, on biaise, on rassure.
Lui demande-t-on son avis ? A-t-il donné des consignes ? En a-t-il les moyens ? C'est quoi, en la circonstance, ce que l'on a l'habitude d'appeler le consentement éclairé ? Problématique importante que l'Eglise refuse d'aborder, en répétant que Jean-Paul II décide de tout. Ainsi nous a-t-on dit qu'il a «imposé à son entourage un retour au Vatican, mais ses médecins lui auraient demandé de réduire ses activités, de ne pas parler et d'éviter tout risque d'infection respiratoire».
On le devine, il n'y a aucune vérité dans ces propos. Tout est évacué pour cause de sacrilège. Puisque, chef d'un Etat, il est censé gouverner jusqu'à son dernier souffle. Devant cette fin de vie lourdement moderne, on aurait pu espérer un peu de transparence. Le Vatican en a décidé autrement. Laissant croire que les conditions de la mort n'avaient pas changé.

 http://www.liberation.fr/page.php?Article=284648

3.23.2005

Le pape se fait rassurant

Mise à jour le mercredi 23 mars 2005 à 14 h 02
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.Le pape Jean-Paul II a tenté de faire taire la rumeur d'une détérioration de son état de santé, mercredi, lorsqu'il est apparu à la fenêtre de son bureau du Vatican pour bénir les milliers de fidèles rassemblés sur la place Saint-Pierre.
Le Saint-Père, qui semblait faible, malgré un léger sourire, a fait le signe de la croix à plusieurs reprises, en silence, avant de regagner son bureau..
Des Polonais rassemblés sur la place Saint-Pierre ont salué cette apparition du pape.
.Jean-Paul II a annulé sa participation à la plupart des célébrations prévues pour la semaine pascale, qui commémore pour les chrétiens la mort et la résurrection du Christ, pour la première fois en 26 ans de pontificat.
Un organisateur de pèlerinages au Vatican, interrogé par l'Agence France-Presse, a dit s'attendre à ce que le pape ne fasse qu'une apparition vidéo, lors du chemin de croix du Vendredi saint, et qu'il donne la bénédiction urbi et orbi de Pâques, dimanche, de la fenêtre de son bureau.

Une santé très fragile

.Jean-Paul II supporterait de moins en moins bien les interventions pour nettoyer et aseptiser la canule posée le 24 février, après sa trachéotomie. Le tube lui permet de respirer par la gorge.
De plus, le pape souffrirait d'anémie parce qu'il ne se nourrit pas suffisamment, ce qui occasionnerait des maux de tête et des nausées. On sait déjà qu'une équipe de médecins du Gemelli se relaie jour et nuit à son chevet pour l'assister en cas de problème.
Laurent Morino rapporte que l'apparition du pape rassure les fidèlesL'hypothèse d'une nouvelle hospitalisation a déjà commencé à circuler à Rome, et les chaînes de télévision ont déjà repris position devant la clinique Gemelli, où le pape a un appartement réservé au 10e étage.
Mais le Vatican n'a fait aucune déclaration officielle sur la santé du pape, ce qui n'a fait qu'alimenter les rumeurs.
           

Le pape apparaît à sa fenêtre au milieu des rumeurs sur une aggravation de son état de santé

-Par Victor L. Simpson--

AP | 23.03.05 | 14:01


CITE DU VATICAN (AP) -- Moins d'une minute pour tenter de rassurer les fidèles: après avoir annulé son audience hebdomadaire, Jean Paul II, l'air amaigri, est apparu mercredi à sa fenêtre pour bénir les pèlerins massés sur la place Saint-Pierre de Rome. Mais cette brève apparition risque de ne pas apaiser les rumeurs d'une soudaine dégradation de la santé du pape, qui, d'après les médias italiens, répondrait mal à son traitement.
Les milliers de pèlerins et touristes attendaient le pape, qui s'est montré à sa fenêtre avec près de 15 minutes de retard sur l'horaire annoncé par le Vatican. Le rideau s'est ouvert et le souverain pontife a levé la main à plusieurs reprises pour bénir les fidèles mais n'a pas prononcé un mot. Dans la foule, certains regardaient la fenêtre avec les larmes aux yeux.
Cette apparition était très attendue, après que le Vatican eut annoncé mardi que le pape ne tiendrait pas sa traditionnelle audience publique du mercredi, qui attire les fidèles du monde entier. Dix jours après sa sortie de la clinique Gemelli de Rome, beaucoup y ont vu le signe que le souverain pontife, âgé de 84 ans, se remet plus lentement que prévu de la trachéotomie subie le 24 février à la suite d'une nouvelle crise respiratoire.
D'autant que les médias italiens affirment que son état s'est soudainement aggravé et que le chef de l'Eglise catholique supporte mal ses médicaments. L'agence de presse Apcom, citant des sources anonymes, expliquait mardi que Jean Paul II avait eu des vomissements et souffrait d'une faiblesse générale et de «forts» maux de tête.
«Aucune hospitalisation de Jean Paul II n'est prévue», a répondu le Dr Rodolfo Proietti, chef de l'équipe de médecins qui entoure le pape, interrogé par l'agence ANSA sur les rumeurs d'un prochain retour à l'hôpital.
Depuis son retour au Vatican, le 13 mars dernier, après sa deuxième hospitalisation depuis le 1er février, le Saint-Siège n'a donné aucune précision sur l'état de santé de Jean Paul II. Des responsables du Vatican ont démenti sous couvert de l'anonymat une soudaine dégradation, mais reconnu que sa convalescence est peut-être plus lente que prévue.
Jean Paul II a réduit ses apparitions publiques et désigné des cardinaux pour le remplacer lors des cérémonies de la très chargée Semaine Sainte. Le Vatican n'a pour l'heure maintenu à son programme que la bénédiction Urbi et Orbi pour ce dimanche de Pâques. Mais aucun remplaçant n'a été nommé pour la procession du Chemin de croix au Colisée, vendredi soir, laissant supposer qu'il pourrait y participer, peut-être via une retransmission vidéo.
Avant l'apparition de mercredi, Jean Paul II ne s'était montré au public que trois fois depuis sa sortie de la clinique Gemelli de Rome. Pour la première fois, en 26 ans de pontificat, le pape n'a pu célébrer dimanche la messe des Rameaux, bénissant seulement les fidèles, l'air au plus mal, se frappant le front avec des gestes saccadés.
Si son état physique reste «fragile», le pape a toute sa tête, assurait le cardinal Camillo Ruini, qui l'a remplacé pour la messe de dimanche, dans un hebdomadaire religieux «Famiglia Cristiana». Il a assuré que le pape continuer de diriger les affaires du Vatican et de prendre les «décisions majeures, comme il l'a toujours fait». AP

Le pape se montre à sa fenêtre du Vatican

Mercredi 23 mars 2005, mis à jour à 11:25

LEXPRESS.fr avec AFP
Le pape Jean Paul II s'est montré mercredi matin à la fenêtre de son bureau du Vatican et a béni les pèlerins présents sur la Place Saint Pierre pour dissiper les inquiétudes sur sa santé.

Patrick HertzogJean Paul II est apparu une minute à la petite foule de 1.000 à 2.000 fidèles, parmi lesquels un groupe de Polonais qui l'ont ovationné et ont entonné un chant religieux. Le pape a semblé sourire et a fait à plusieurs reprises le signe de croix avant d'être reconduit dans son bureau.
L'état de santé de Jean Paul II s'aggrave et inspire de vives craintes, donnant une tonalité dramatique aux célébrations de Pâques, dont le pape est très largement absent pour la première fois de son pontificat.
"Le pape a éprouvé des malaises toute la journée de lundi, pendant la nuit et encore mardi", selon une source du Vatican. Mais un de ses médecins a écarté mardi soir la nécessité d'une nouvelle hospitalisation. Jean Paul II "supporte de moins en moins bien les interventions pour nettoyer et aseptiser la canule" posée le 24 février lors de sa seconde hospitalisation, a-t-on expliqué.
De plus, il se nourrit très peu, ce qui entraîne de l'anémie. Pour compenser, il prend du fer, mais cela provoque des maux de tête et des nausées", a poursuivi cette source. "La pose d'une sonde gastrique pourrait être nécessaire car l'alimentation par intraveineuse risque de ne pas être suffisante", a averti mardi soir le neurologue italien Gianni Pezzoli.
Tout ce stress constitue une fatigue pour le coeur de Jean Paul II. "Si ces problèmes ne sont pas résolus après Pâques, une nouvelle hospitalisation sera envisagée", a-t-on souligné de source vaticane.
L'hypothèse a déjà commencé à circuler mardi à Rome, et les media télévisés ont repris position devant la polyclinique Gemelli où le pape a un appartement réservé au dixième étage.
"Aucune hospitalisation du pape n'est prévue actuellement", a assuré mardi soir à l'agence italienne Ansa le chef du service d'urgence de la polyclinique, le professeur Rodolfo Proietti, pour désamorcer cette rumeur.
Car le Vatican n'a fait aucune déclaration officielle. Le porte-parole du Vatican, Joaquin Navarro-Valls, n'a en fait donné aucune information sur la santé du pape depuis son retour au Vatican, le 13 mars. Et il a annulé mardi sans explications sa participation à la présentation d'un film documentaire sur le pontificat de Jean Paul II au siège de l'association de la presse étrangère.
La trachéotomie doit aider Jean Paul II à mieux respirer et surtout à éviter de l'hospitaliser pour désencombrer ses bronches. Mais les médecins avaient averti que cette intervention présentait des risques, car elle expose le patient à des infections, et qu'une longue convalescence serait nécessaire.
Une équipe de médecins du Gemelli se relaie jour et nuit au chevet du pape au Vatican pour l'assister en cas de problème.
Président de l'association italienne du Parkinson, maladie dont le pape souffre depuis le début des années 90, le professeur Pezzoti a averti que les traitements risquent d'avoir atteint leurs limites pour le pape et qu'on se dirigeait vers une détérioration graduelle de son état de santé.
La santé de Jean Paul II semble exclure désormais une participation autre que symbolique aux célébrations de la semaine pascale, qui commémore pour les croyants la mort et la résurrection du Christ.
Il ne doit intervenir qu'au dernier jour des cérémonies, le dimanche de Pâques, pour la bénédiction "Urbi et orbi" (à Rome et au monde), selon le programme du Vatican. Sa présence à la cérémonie du chemin de Croix vendredi soir au Colisée, dans le centre historique de Rome, est désormais exclue. Il pourrait cependant faire une apparition par liaison télévisée au début et à la fin de la cérémonie.

Pas d'hospitalisation du pape dans l'immédiat, selon son médecin

AP | 23.03.05 | 11:03


CITE DU VATICAN (AP) -- Le pape Jean Paul II réagirait mal à son traitement mais le Vatican a déclaré mercredi que le souverain pontife ferait tout de même une apparition à la fenêtre de son appartement en fin de matinée pour bénir les fidèles.
L'annonce du Vatican a rassuré les pèlerins rassemblés sur la place Saint-Pierre dans l'espoir d'apercevoir le Saint-père.
Mardi, le Saint-Siège avait annoncé que Jean Paul II ne présiderait pas sa traditionnelle audience générale du mercredi, signe qu'il se remettait plus difficilement que prévu de la trachéotomie qu'il a subie le 24 février dernier.
Toutefois, le chef de l'équipe médicale entourant le pape, a réagi aux informations données par les médias italiens selon lesquels la santé de Jean Paul II se serait brusquement aggravée en excluant une nouvelle hospitalisation du pape après sa sortie il y a seulement dix jours.
«Aucune hospitalisation de Jean Paul II n'est prévue», a souligné le Dr Rodolfo Proietti cité mardi soir par l'agence ANSA.
230503 mar 05GMT

L'influence de l'Eglise s'est diffusée à tous les partis politiques de la Péninsule

LE MONDE
Rome de notre correspondant

ls sont tous venus, ils étaient tous là. Dès l'annonce de l'hospitalisation du pape, le 24 février, un émissaire du gouvernement italien, dépêché par Silvio Berlusconi, était arrivé à la polyclinique Agostino-Gemelli. Dans les jours suivants, une demi-douzaine de ministres s'y sont succédé. Nul ne sait s'ils ont rencontré personnellement Jean Paul II, mais tous se sont montrés rassurants à leur sortie, en disant leur admiration pour l'illustre malade.
Même empressement à gauche : le maire de Rome, Walter Veltroni, s'est présenté à l'hôpital pour transmettre au chef de l'Eglise catholique "les vœux de tous les Romains". A la télévision, Fausto Bertinotti, dirigeant de Refondation communiste, lui a souhaité "longue vie", après avoir salué sa "présence extraordinaire, même pour les non-croyants". D'un bout à l'autre de l'échiquier, depuis le leader des Verts, Alfonso Pecoraro Scanio, jusqu'aux dirigeants de la droite extrême, toute la classe politique italienne se range derrière ce "personnage charismatique".
Jean Paul II fait l'unanimité, après vingt-six ans de pontificat. D'une part en raison de sa personnalité. D'autre part, parce que les relations entre l'Italie et l'Eglise catholique ont changé depuis la disparition de la Démocratie chrétienne (DC) en 1992. Récemment, les aigreurs de la Ligue du Nord contre lui, sous prétexte qu'il s'était exprimé en dialecte romain, avaient déclenché une vague de désapprobation. "Il y a une sympathie diffuse pour ce pape en Italie, reconnaît l'historien Andrea Riccardi, président de la Communauté laïque Sant'Egidio. Dans un pays dont l'influence internationale est en déclin, ce Polonais est paradoxalement perçu comme "un grand Italien" sur la scène mondiale." Karol Wojtyla avait dû donner beaucoup de gages dans les premiers mois de son pontificat en multipliant les voyages en Italie, mais son style a vite convaincu les Italiens.
Jusqu'en 1978, il y a toujours eu une politique des papes pour l'Italie. Qui se souvient que Pie XII était intervenu personnellement pour la constitution d'une liste démocrate-chrétienne afin de contrer les communistes aux municipales de Rome en 1952 ? Ou que Paul VI, en 1964, avait plaidé pour que la DC aille unie à l'élection présidentielle ? "Jean Paul II ne s'est jamais mêlé à la politique politicienne, c'est un pape religieux", souligne Andrea Riccardi. S'il ne s'est pas impliqué personnellement, il ne s'est jamais désintéressé des débats politiques du pays. "Il a confié les affaires italiennes à l'épiscopat", résume Francesco Margiotta Broglio, professeur à l'université de Florence, spécialiste des relations entre l'Eglise et l'Etat. Selon lui, Jean Paul II est toujours resté très à l'écoute de la Conférence épiscopale italienne (CEI), présidée par le cardinal Camillo Ruini, vicaire de Rome. Andrea Riccardi estime que "Ruini a traduit en italien le "wojtylisme"".
Cette fonction de relais s'est paradoxalement accrue au début des années 1990 avec la chute de la Démocratie chrétienne. Avec la disparition de l'unité politique des catholiques, l'influence de l'Eglise s'est diffusée à tous les partis. Naguère, Giulio Andreotti utilisait une métaphore boulangère pour définir l'action de la Démocratie chrétienne : il y a deux fours, disait-il, celui de droite et celui de gauche, et la DC pouvait mettre le pain dans le four de son choix. Depuis, on a assisté à la multiplication des fours : "Il y a une transversalité catholique dans la classe politique, précise M. Margiotta Broglio. Tous les partis essaient d'offrir quelque chose à l'Eglise."
On s'en aperçoit lors des débats sur les questions de société. Ce sont les "courants catholiques" des partis de gauche comme de droite qui ont donné, en 2004, une majorité à la très restrictive loi sur la fécondation assistée. Le Parti radical, partisan de l'abrogation de ce texte, a les pires difficultés à trouver sa place aux côtés de la gauche réformatrice conduite par le catholique Romano Prodi.
"Avant, l'Eglise ne pouvait pas court-circuiter la DC. Désormais, chaque évêque a une grande marge de manœuvre pour dialoguer avec les responsables politiques locaux, quelle que soit leur couleur politique", explique Francesco Margiotta Broglio. De nombreuses lois régionales sont ainsi votées en faveur du culte catholique. Pour beaucoup d'observateurs, le retour d'un pape italien au Vatican réduirait le pouvoir de l'épiscopat acquis sous Jean Paul II. Cette transversalité se retrouve dans les puissants mouvements catholiques laïques (Communion et Libération, Communauté de Sant'Egidio, etc.), dont le poids politique est à la mesure de leur rôle social. En février, tous les courants politiques étaient représentés aux obsèques de Mgr Luigi Giussani, fondateur de Communion et Libération (CL). La cérémonie était présidée par trois papabili : Mgr Angelo Scola, patriarche de Venise, proche de CL, le cardinal de Milan, Dionigi Tettamanzi, considéré comme progressiste, et l'Allemand Josef Ratzinger, symbole de la continuité.
"L'électorat catholique est moins clairement identifié, c'est un électorat en mouvement, mais il est plus décisif qu'avant", assure Rocco Buttiglione, ministre des affaires européennes, président du parti centriste UDC, héritier de la Démocratie chrétienne. D'où la vigilance de chaque parti à ne pas froisser les convictions catholiques. On se souvient qu'en 2004, toute l'Italie, de l'extrême droite aux communistes, s'était opposée à l'enlèvement des crucifix des salles de classes que réclamait un leader musulman."En Italie, le Vatican est une réalité incontournable, pas seulement un lobby, mais un point de synthèse de la vie du pays", rappelle M. Riccardi.
La gauche affiche sa proximité avec Jean Paul II malgré ses options conservatrices en matière de mœurs : "Il a joué un grand rôle dans le processus de disparition du communisme, rappelle Rocco Buttiglione. Or, la gauche italienne doit faire oublier ses liens avec le communisme. Cela lui est d'autant plus difficile de critiquer ce pape qu'il n'est pas non plus procapitaliste, il a développé une critique humaniste et éthique du capitalisme."


Jean-Jacques Bozonnet
Article paru dans l'édition du 23.03.05

Rumeurs alarmistes sur la santé du Pape

VATICAN

Le Vatican : Hervé Yannou
[LE FIGARO 23 mars 2005]

Depuis la dernière apparition publique de Jean-Paul II dimanche dernier à l'issue de la messe du dimanche des Rameaux, les rumeurs les plus alarmistes courent de nouveau à Rome autour de l'évolution de son état de santé. Le Pape est apparu très amaigri, physiquement diminué. II n'a pas prononcé un seul mot, contrairement au dimanche précédent.
«Le Pape a éprouvé des malaises toute la journée de lundi, pendant la nuit et encore mardi», selon une source vaticane citée par l'AFP. Jean-Paul II «supporte de moins en moins les interventions visant à nettoyer et aseptiser la canule» qui lui a été posée le 24 février lors de la deuxième hospitalisation, a-t-on précisé. «De plus, il se nourrit très peu, ce qui entraîne de l'anémie. Pour compenser, il prend du fer, mais cela provoque des maux de tête et des nausées», a poursuivi la source. En outre, ce stress constitue une fatigue pour le coeur du malade. Pourtant, «il n'est pas prévu d'hospitaliser Jean-Paul II», a affirmé hier soir le chef de l'équipe des médecins pour démentir des rumeurs sur un retour du Pape à la clinique Gemelli de Rome.
L'absence de toute information officielle du Vatican nourrit les inquiétudes. Hier, Joaquin Navarro Valls, le porte-parole du Saint-Siège souvent décrié, a annulé au dernier moment sa participation à une conférence de presse de présentation d'un film documentaire sur Jean-Paul II. Cette absence a relancé toutes les spéculations. «Prie pour le Pape, parce que son état s'aggrave», aurait confié le secrétaire du Saint-Père, Stanislas Dziwisz, à un prêtre polonais, rapportait hier le quotidien italien Il Messagero.
Seule réaction de la part du Vatican, la confirmation de l'annulation de l'audience générale d'aujourd'hui. Elle n'a plus eu lieu depuis l'hospitalisation du Pape, le 24 février. Reste à savoir s'il apparaîtra aux fidèles, soit à sa fenêtre, soit par vidéoconférence. Tout aurait été installé dans ses appartements pour permettre cette liaison télévisée. C'est par ce moyen qu'il pourrait aussi participer symboliquement au chemin de Croix du Colisée vendredi soir.

Les rumeurs courent sur l'état de santé du pape

Radio Canada mercredi 23 mars 2005, 2 h 12 .
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.À quelques jours des célébrations de Pâques, l'état de santé de Jean-Paul II se serait aggravé. Des rumeurs courent même qu'il sera à nouveau hospitalisé. Près de 10 jours après sa sortie de la clinique Gemelli de Rome, le pape continue de limiter ses apparitions publiques.
Selon une source de l'AFP, le souverain pontife, âgé de 84 ans, « a éprouvé des malaises toute la journée de lundi, pendant la nuit et encore mardi ». Mardi soir, un de ses médecins a écarté une nouvelle hospitalisation, du moins à court terme.
Jean-Paul II supporterait de moins en moins bien les interventions pour nettoyer et aseptiser la canule posée le 24 février, après sa trachéotomie. Le tube lui permet de respirer par la gorge.
De plus, le pape souffrirait d'anémie parce qu'il ne se nourrit pas suffisamment, ce qui occasionnerait des maux de tête et des nausées. On sait déjà qu'une équipe de médecins du Gemelli se relaie jour et nuit à son chevet pour l'assister en cas de problème.
L'hypothèse d'une nouvelle hospitalisation a déjà commencé à circuler à Rome, et les chaînes de télévision ont déjà repris position devant la clinique Gemelli, où le pape a un appartement réservé au 10e étage.

Le Vatican reste coi.

Mais le Vatican n'a fait aucune déclaration officielle sur la santé du pape, ce qui n'a fait qu'alimenter les rumeurs. Le Saint-Siège s'est borné à indiquer qu'il n'y aurait pas d'audience générale mercredi, tout en laissant entendre que Jean-Paul II pourrait se montrer à la fenêtre de ses appartements, comme il l'a fait mercredi dernier.
La santé du pape semble exclure une participation autre que symbolique aux célébrations de la semaine pascale, qui commémore pour les chrétiens la mort et la résurrection du Christ. Selon le programme du Vatican, Jean-Paul II ne doit intervenir que le dimanche de Pâques, pour la bénédiction urbi et orbi.
Depuis sa sortie de la clinique Gemelli, le 13 mars dernier, le pape est apparu à trois reprises en public. Lors de sa dernière apparition, pour le dimanche des Rameaux, il a béni la foule en silence depuis la fenêtre de son appartement.

3.22.2005

Pas d’audience générale prévue mercredi mais le pape pourrait saluer les fidèles

ZF05032201

2005-03-22

CITE DU VATICAN, Mardi 22 mars 2005 (ZENIT.org) - Mercredi, l’audience générale n’est pas prévue et le Vatican n’a pas encore communiqué le mode de participation du pape aux célébrations pascales car celui-ci poursuit sa convalescence depuis l’opération du 24 février pour une trachéotomie.
Le vice-directeur de la salle de presse du Saint-Siège, le P. Ciro Benedettini, n’exclut pas la possibilité que le pape bénisse les fidèles depuis sa fenêtre demain mercredi.
Mercredi dernier, le pape était apparu par surprise à la fenêtre de son bureau pour bénir les visiteurs présents place Saint-Pierre, dont de nombreux polonais.
A une question sur l’aggravation de la santé du pape, le P. Benedettini a répondu que la convalescence du pape continue et il a annoncé qu’un bulletin de santé serait publié dès que cela serait opportun.
Dimanche dernier, à l’issue de la messe des Rameaux, qui correspondait à la XXe Journée mondiale de la jeunesse, le pape s’est contenté de laisser sa fenêtre ouverte pour manifester sa présence, et de suivre la célébration à la télévision. Lorsqu’il est apparu à l’angélus, il n’a pas fait de déclaration mais a béni les jeunes avec un rameau d’olivier.
Selon le P. Benedettini, aucune décision n’est encore prise sur la présence du pape au Chemin de Croix du Colisée au soir du Vendredi Saint.
Les médecins ont recommandé au pape le repos : la seule apparition publique confirmée pour les célébrations pascales est la bénédiction Urbi et Orbi, sur le Monde et la Ville, dimanche prochain, dimanche de Pâques.
Jean-Paul II poursuit sa convalescence depuis l’opération du 24 février pour une trachéotomie.

Vives inquiétudes sur une aggravation de la santé du pape

CITE DU VATICAN (AFP)

L'état de santé de Jean Paul II s'aggrave et inspire de vives craintes, donnant une tonalité dramatique aux célébrations de Pâques, dont le pape est très largement absent pour la première fois de son pontificat.
"Le pape a éprouvé des malaises toute la journée de lundi, pendant la nuit et encore mardi", selon une source du Vatican. Mais un de ses médecins a écarté mardi soir la nécessité d'une nouvelle hospitalisation.
Jean Paul II "supporte de moins en moins bien les interventions pour nettoyer et aseptiser la canule" posée le 24 février lors de sa seconde hospitalisation, a-t-on expliqué.
"De plus, il se nourrit très peu, ce qui entraîne de l'anémie. Pour compenser, il prend du fer, mais cela provoque des maux de tête et des nausées", a poursuivi cette source. "La pose d'une sonde gastrique pourrait être nécessaire car l'alimentation par intraveineuse risque de ne pas être suffisante", a averti mardi soir le neurologue italien Gianni Pezzoli.
Tout ce stress constitue une fatigue pour le coeur de Jean Paul II. "Si ces problèmes ne sont pas résolus après Pâques, une nouvelle hospitalisation sera envisagée", a-t-on souligné de source vaticane.
L'hypothèse a déjà commencé à circuler mardi à Rome, et les media télévisés ont repris position devant la polyclinique Gemelli où le pape a un appartement réservé au dixième étage.
"Aucune hospitalisation du pape n'est prévue actuellement", a assuré mardi soir à l'agence italienne Ansa le chef du service d'urgence de la polyclinique, le professeur Rodolfo Proietti, pour désamorcer cette rumeur.
Car le Vatican n'a fait aucune déclaration officielle. Le porte-parole du Vatican, Joaquin Navarro-Valls, n'a en fait donné aucune information sur la santé du pape depuis son retour au Vatican, le 13 mars. Et il a annulé mardi sans explications sa participation à la présentation d'un film documentaire sur le pontificat de Jean Paul II au siège de l'association de la presse étrangère.
Pour ajouter à la confusion, le Vatican a annoncé mardi qu'il n'y aurait pas d'audience générale mercredi, mais dans le même temps, a laissé entendre que Jean Paul II pourrait se montrer à la fenêtre de ses appartements, comme il l'a fait mercredi dernier.
La trachéotomie doit aider Jean Paul II à mieux respirer et surtout à éviter de l'hospitaliser pour désencombrer ses bronches.
Mais les médecins avaient averti que cette intervention présentait des risques, car elle expose le patient à des infections, et qu'une longue convalescence serait nécessaire.
Une équipe de médecins du Gemelli se relaie jour et nuit au chevet du pape au Vatican pour l'assister en cas de problème.
Président de l'association italienne du Parkinson, maladie dont le pape souffre depuis le début des années 90, le professeur Pezzoti a averti que les traitements risquent d'avoir atteint leurs limites pour le pape et qu'on se dirigeait vers une détérioration graduelle de son état de santé.
Jean Paul II a exigé de rentrer au Vatican le dimanche 13 mars, en avance sur le programme souhaité par ses médecins, mais il semble avoir surestimé ses capacités de récupération.
Dimanche, après la liturgie des rameaux, il s'est montré une minute à la fenêtre de son bureau pour bénir la foule, mais il est resté muet.
Il est apparu amaigri, les traits du visage tirés, et a même eu un geste de souffrance, masquant son visage de sa main. Il a toutefois marqué par un geste rageur sa contrariété de devoir rapidement quitter la scène sans avoir pu parler.
La santé de Jean Paul II semble exclure désormais une participation autre que symbolique aux célébrations de la semaine pascale, qui commémore pour les croyants la mort et la résurrection du Christ.
Il ne doit intervenir qu'au dernier jour des cérémonies, le dimanche de Pâques, pour la bénédiction "Urbi et orbi" (à Rome et au monde), selon le programme du Vatican.
Sa présence à la cérémonie du chemin de Croix vendredi soir au Colisée, dans le centre historique de Rome, est désormais exclue. Il pourrait cependant faire une apparition par liaison télévisée au début et à la fin de la cérémonie.

Les six hommes qui dirigent le Vatican

Angelo Sodano, 77 ans, secrétaire d'Etat, né en 1927 à Asti (Italie). C'est lui qui, pendant la convalescence du pape, joue le premier rôle. Ancien nonce dans le Chili de Pinochet, il a été rappelé, en 1990, comme secrétaire d'Etat, numéro deux. C'est lui qui a mis en œuvre la politique du pape dans les guerres des Balkans, du Proche-Orient et de l'Irak.
Josef Ratzinger, 77 ans, préfet de la doctrine et doyen du Sacré Collège, né en 1927 en Bavière (Allemagne). C'est l'homme sur lequel le pape malade peut se reposer. Il a inspiré la plupart des grands documents doctrinaux et prises de position morales, tant controversées, du pontificat.
Giovanni-Battista Ré, 71 ans, préfet des évêques, né en 1934 près de Brescia (Italie). Il a fait toute sa carrière à la Curie où il fut promu, en 1987, comme "substitut" (numéro 3) par Jean Paul II. Ce grand commis s'est imposé comme le principal homme de confiance du pape dans ses voyages, la gestion au jour le jour, la relation avec le milieu politique italien.
Camillo Ruini, 74 ans, vicaire de Rome, né en 1931 près de Modène (Italie). Président de la conférence des évêques, il est le porte-parole de l'Eglise italienne sur tous les sujets de la vie politique de la péninsule.
Leonardo Sandri, substitut, 61 ans, né en 1943 à Buenos Aires (Argentine). Diplomate, il est devenu la "voix" du pape malade. Simple, chaleureux, on lui voit à Rome un grand avenir.
Stanislaw Dziwisz, secrétaire particulier de Jean Paul II, né près de Cracovie (Pologne) en 1939. Depuis le jour de l'élection de Karol Wojtyla le 16 octobre 1978, il partage la vie quotidienne du pape. Dans les appartements privés, comme à l'hôpital, c'est lui qui filtre tous les accès. Affable et ferme, il est le confident, le "chien de garde" qui a la confiance absolue de son maître.

Le pape, malade, sera absent des cérémonies de Pâques

LE MONDE | 22.03.05 | 15h28  •  Mis à jour le 22.03.05 | 16h43

Les dizaines de milliers de pèlerins qui vont affluer à Rome pour les fêtes de Pâques vont être déçus. Cette année, ils ne verront pas le pape, l'entendront encore moins. Pour la première fois depuis le début de son pontificat, il y a vingt-six ans, Jean Paul II ne participera pas, les jeudi 24, vendredi 25 et dimanche 27 mars, aux longues cérémonies qu'il avait encore présidées ces dernières années, malgré le peu d'énergie qui lui restait. En Italie, cette absence du pape pour les jours les plus importants de la liturgie chrétienne - jeudi saint, vendredi saint et jour de Pâques - marque les esprits.
Pour la fête des Rameaux, dimanche 20 mars, il n'a fait qu'une apparition muette à la fenêtre de ses appartements qui, bien loin de rassurer, a inquiété davantage. Les images télévisées ont montré un homme amaigri, souffrant, portant au poignet un pansement (cathéter) et tapant de la main sur un pupitre quand son secrétaire particulier a mis fin à la scène. Jean Paul II n'a pu adresser un seul mot aux 50 000 pèlerins qui avaient fait le voyage de Rome et l'attendaient depuis deux heures. Le pape est "prisonnier de son corps", commente-t-on. Réduit au rang d'icône muette, le lien direct avec les fidèles, dans lequel il a toujours puisé sa force, est aujourd'hui rompu.
Au Vatican, les bulletins d'information sont devenus inexistants. Rome bruit donc de rumeurs sur l'état de santé d'un homme qui, depuis son retour de la polyclinique Gemelli le lundi 17 mars, inspire plus d'inquiétude que d'optimisme. Le pape ne supporterait pas la canule insérée dans la trachée artère qui, depuis la trachéotomie du 24 février, l'aide à respirer, mais l'empêche de parler. Les seuls mots entendus de sa bouche remontent au dimanche 13 à Gemelli. Selon les médecins, le maintien de cette canule le libère du risque d'étouffement lié à la progression du syndrome de Parkinson. Mais elle est aussi un foyer d'infections et c'est par peur d'un risque microbien que le corps médical a convaincu le convalescent de ne pas rester au contact des foules de la semaine sainte.
Tous les usages sont donc bouleversés à Rome. Personne ne sait encore si, dimanche 27 mars, jour de Pâques, Jean Paul II sera en mesure de prononcer au moins quelques mots de son message urbi et orbi, traditionnel tour d'horizon de la situation du monde, lu dans toutes les langues, précédant sa bénédiction. Le seul rendez-vous auquel il n'entend pas se dérober et qui, avec sa maladie, va prendre cette année un relief particulier, est le traditionnel chemin de croix du vendredi saint, qui a lieu au début de la nuit au Colisée de Rome en présence de dizaines de milliers de pèlerins et des caméras du monde entier.

"LA PASSION DE JEAN PAUL II"

Le chemin de croix est le moment le plus émouvant de la semaine sainte. Jean Paul II n'a jamais manqué cette commémoration de la Passion du Christ dans le lieu symbolique où étaient martyrisés les premiers chrétiens. A Rome, certains assurent que, contre l'avis de ses médecins, il prendra le risque d'une sortie de sa chambre médicalisée. L'idée serait d'installer au Colisée une sorte de pavillon chauffé et protégé. D'autres estiment, en revanche, qu'il restera enfermé dans ses appartements, mais participera à la cérémonie par un système de transmission vidéo.
"Le chemin de croix fait partie de la mystique pontificale", commente Philippe Levillain, historien de la papauté qui rappelle que, quelques mois avant sa mort en août 1978, le pape Paul VI, malgré une douloureuse arthrose au genou, avait lui-même porté au Colisée la croix de bois. "Etrange semaine sainte, commente de son côté Orazio Petrosillo dans le Messagero du lundi 21 mars. La Passion du Christ sera cette année à Rome la Passion de Jean Paul II."
Les apparences d'une continuité institutionnelle sont toutefois sauves. Le pape a nommé des cardinaux-évêques (le sommet du Sacré Collège) pour le suppléer à la présidence des cérémonies pascales. C'est le cardinal Josef Ratzinger, doyen du Sacré Collège, qui sera cette année l'auteur des méditations des quatorze stations du chemin de croix et présidera samedi la veillée pascale dans la basilique vaticane, alors que le cardinal Angelo Sodano, secrétaire d'Etat du Saint-Siège, présidera la cérémonie du dimanche de Pâques.
Eprouvée par la double hospitalisation de Jean Paul II, convaincue enfin que sa convalescence sera longue, la Curie est entrée dans une phase inédite de son histoire. L'illusion d'un pape encore capable de décider est levée. L'entourage des cardinaux et secrétaires a pris les affaires en main. Il lui revient d'animer et de coordonner les dossiers, de conseiller le pape pour les nominations, de réagir à sa place aux événements de l'Eglise et du monde. Ce qui fait dire avec humour à l'un d'entre eux, Giovanni-Battista Ré, en charge de la congrégation des évêques : "Le pape fait travailler les cardinaux, une fois n'est pas coutume !"


Henri Tincq
Article paru dans l'édition du 23.03.05

3.21.2005

L'Argentine tient tête au Saint-Siège

Le président Nestor Kirchner a retiré l'accrédition de l'évêque des armées après une polémique sur l'avortement

Lamia Oualalou
[LE FIGARO 21 mars 2005]

Après l'Espagne, engagée le mois dernier dans une vive polémique avec le Vatican à propos de l'usage du préservatif, c'est au tour de la très catholique Argentine de tenir tête au Saint-Siège. Le conflit couve depuis un peu plus d'un mois. Il fait suite aux déclarations du ministre de la santé Gines Gonzalez Garcia en faveur d'une dépénalisation de l'avortement, interdit en Argentine comme dans la majorité des pays d'Amérique latine.
Spécialiste reconnu de santé publique, Gines Gonzalez Garcia soulignait que près de 500 000 avortements clandestins avaient lieu chaque année, provoquant la mort de centaines de jeunes femmes, en particulier dans les milieux défavorisés. Ces propos avaient déclenché la colère de l'évêque des armées Antonio Baseotto, qui, en accord avec la position du Vatican, a estimé qu'un membre du gouvernement «ne pouvait faire l'apologie de l'avortement». Faisant référence à une phrase de l'Evangile, il a conclu que les personnes tenant de tels propos «méritaient qu'on leur attache une pierre autour du cou et qu'on les jette à la mer».
Difficile de trouver métaphore plus malheureuse dans une Argentine travaillée par le souvenir de la dernière dictature (1976-1983). La majorité des 30 000 personnes assassinées par la junte militaire a été jetée dans des sacs lestés de pierres au fond du Rio de la Plata. Que ces propos soient tenus par un évêque est plus douloureux encore : l'Eglise argentine, au contraire de son homologue chilienne qui avait constamment affronté Augusto Pinochet, a le plus souvent fermé les yeux sur les exactions de la dictature.
Le gouvernement du président Nestor Kirchner, formé de nombreux ex-«montoneros», un mouvement guérillero dont les rangs ont été décimés par la dictature, ne pouvait laisser passer un tel discours. Il y a quelques semaines, le chef de l'Etat a demandé au Vatican de rappeler cet évêque. Face au refus du Saint-Siège, Nestor Kirchner a retiré lui-même son accréditation à Antonio Baseotto vendredi dernier. Une bravade très mal prise à Rome où elle a été qualifiée par le porte-parole du Pape, Joaquin Navarro Valls, de «violation de la liberté religieuse». Tout le monde attend désormais de voir si l'aumônier des armées sera autorisé à célébrer l'office demain, dans le cadre de la semaine sainte.
Le bras de fer entre le Vatican et Buenos Aires repose, des deux côtés, sur des considérations de politique intérieure. Le Saint-Siège refuse de céder dans une Amérique latine devenue le premier continent catholique. Nestor Kirchner, qui s'est bâti une image de défenseur des victimes de la dictature, peut difficilement faire marche arrière. La polémique est d'autant plus paradoxale que le président argentin ne souhaite pas ouvrir de discussion sur la légalisation de l'avortement, à laquelle il est clairement opposé. Toutefois, pour son chef de cabinet Alberto Fernandez, la société argentine ne pourra pas longtemps faire l'économie d'un débat sur le sujet : «Cela me rappelle les discussions autour du divorce, quand plus de 3 millions de couples vivaient dans l'illégalité», leur mariage précédent n'ayant pas été légalement dissous.
Le décalage entre la loi et les moeurs est surtout flagrant à Buenos Aires et dans sa région. L'Argentine étant un pays fédéral, les différentes provinces – la capitale en constitue une à elle seule – disposent chacune d'une législation propre. En juillet 2003, Buenos Aires a ainsi célébré le premier mariage homosexuel de l'Amérique latine. Il y a dix jours, un juge de la ville de la Plata, à une soixantaine de kilomètres de la capitale, a été plus loin, en autorisant un homosexuel à bénéficier d'une pension de veuvage à la mort de son compagnon.

Très affaibli, le Pape bénit la foule en silence

LE VATICAN Pour la célébration du dimanche des Rameaux, Jean-Paul II est apparu brièvement à sa fenêtre

Pour la première fois depuis le début de son pontificat, Jean-Paul II n'a pas présidé hier la messe du dimanche des Rameaux qui ouvre la période de Pâques. Mais, une semaine après son retour de l'hôpital Gemelli – après 18 jours d'hospitalisation et une trachéotomie –, il est à nouveau apparu brièvement à la fenêtre de ses appartements. Visiblement très affaibli, il est resté silencieux.

Vatican : Hervé Yannou
[21 mars 2005]


L'absence de Jean-Paul II a ravivé les inquiétudes des milliers de jeunes participants à la messe du dimanche des Rameaux, consacrée depuis vingt ans aux Journées mondiales de la jeunesse. C'est le cardinal Camillo Ruini, vicaire de Rome, qui a présidé la liturgie et béni les rameaux d'oliviers et les feuilles de palmiers tressées, symbolisant l'entrée triomphale du Christ à Jérusalem et le début des célébrations de la semaine sainte. Au troisième étage du palais apostolique, la fenêtre du bureau du Pape était ouverte, les rideaux tirés dans l'attente de son apparition.
Devant une foule immense, le cardinal Ruini a évoqué le «visage fatigué» du Pape et sa souffrance. A l'issue de la cérémonie, selon un rituel établi depuis quelques semaines, Mgr Leonardo Sandri a lu le message du Saint-Père pour la prière de l'Angélus. Le Pape s'est adressé aux jeunes. Il les a invités à se rendre en août à Cologne pour les JMJ, mais n'a pas dit qu'il les y rejoindrait. Ce déplacement en Allemagne est le seul qui soit officiellement inscrit à son agenda.
Applaudi par des dizaines de milliers de fidèles très émus, Jean-Paul II est alors apparu brièvement à sa fenêtre. Un rameau d'olivier à la main, il a, en silence, béni la foule. Dimanche dernier, il avait prononcé en direct quelques mots, pour la première fois depuis sa seconde hospitalisation. L'apparition d'hier est la troisième du Pape depuis son retour au Vatican le 13 mars. Mercredi dernier, la traditionnelle audience hebdomadaire n'était pas prévue, mais il s'est montré une courte minute à sa fenêtre. Le lendemain, il est apparu par vidéoconférence. Devant les images de sa souffrance, la retransmission a été interrompue à deux reprises. En l'absence de tout bulletin de santé officiel, ces apparitions laissent deviner l'état de grande faiblesse de Jean-Paul II. Une équipe médicale l'entoure en permanence.
C'est le cardinal Angelo Sodano, «numéro deux» du Saint-Siège, qui assure les audiences diplomatiques. Hier, les petites délégations de Sanremo et de Bordighera, les villes d'Italie où sont tressées les feuilles de palmier pour le jour des Rameaux au Vatican, n'ont pas été reçues par le Pape, mais par son secrétaire.
Rien ne filtre du troisième étage du palais apostolique où réside Jean-Paul II. Toutes ses apparitions sont décidées au dernier moment, selon l'évolution de son état de santé. On ne sait toujours pas dans quelle mesure et de quelle manière il participera aux cérémonies de la semaine pascale.

3.20.2005

"Le métissage entre chrétienté et islam n'est pas une idée naïve"

Cardinal Angelo Scola, patriarche de Venise

Le Monde, 20 mars 2005

Le cardinal Angelo Scola, patriarche de Venise, 62  ans, l'un des favoris pour la succession de Jean Paul  II, vient de créer - avec d'autres évêques d'Europe, du Moyen-Orient et d'Asie - un centre de recherche et une revue internationale de dialogue avec l'islam, appelée Oasis (oasis@marcianum.it). Présentant cette initiative à l'Unesco, mardi 15  mars, il a lancé un appel au dialogue entre cultures chrétienne et musulmane.

N'êtes-vous pas sceptique, depuis les attentats du 11  septembre 2001, quant aux chances d'un dialogue entre islam et christianisme  ?

Ce dialogue, nous voulons le mener avec des intellectuels et des religieux musulmans, les inviter à Venise, au  Caire, pourquoi pas à Paris. Car nous pensons que le métissage des civilisations n'est pas une idée naïve, mais un processus historique en actes, attesté par les migrations, les relations commerciales ou le tourisme. Il ne nous appartient pas de définir les politiques d'immigration. Mais les chrétiens et les musulmans, en Europe ou au Moyen-Orient, ont à vivre ensemble. Les mariages mixtes, dans un pays comme l'Italie, progressent à vive allure. Ce métissage est donc une réalité, mais aussi une chance. Il n'y a pas d'attitude plus réaliste que de prendre le risque d'un dialogue de communauté à communauté, de foi à foi, de langue à langue. Le témoignage personnel du croyant implique une  identité forte, mais dynamique. Ou celle-ci est exclusive et débouche sur toutes les formes connues d'intolérance et de rejet. Ou elle est ouverte et capable de dialogue d'égal à égal avec d'autres identités.

Mais les minorités chrétiennes au Proche-Orient, en Asie, en Afrique ont un regard plus critique que vous sur l'islam...

C'est vrai, mais cette idée d'un dialogue culturel est venue des évêques de ces régions du Moyen-Orient, du Maghreb, du Pakistan, d'Indonésie, qui sont parmi les plus exposées aux tensions internationales et aux mouvements islamistes. Ce sont eux qui nous demandent de les aider à trouver des instruments d'éducation pour des communautés chrétiennes qui vivent avec des musulmans majoritaires sur leur sol.
Ce qui se joue aujourd'hui, dans les événements au Liban, en Egypte, en Israël, dans les territoires palestiniens, est vital pour l'équilibre de cette région et de nos communautés. Le Liban est l'un des derniers espaces de chrétienté au Proche-Orient. Il faut tout faire pour aider les minorités chrétiennes à rester. Mesure-t-on ce que représenterait, en termes de civilisation, la disparition de toute présence chrétienne et la transformation en musée de cette terre sur laquelle est né le Christ  ?

N'y a-t-il pas une exigence de réciprocité quant à la liberté des chrétiens en terre d'islam  ?

Si, bien entendu. Nous devons demander aux pays d'islam de tout faire pour respecter la liberté de chaque croyant qui vit et travaille sur leur sol, de donner à chacun, quelle que soit sa confession, les moyens d'exercer sa liberté. Mais je ne veux pas exiger à tout prix la réciprocité. Il y a une part de don gratuit, dans la foi chrétienne, qui peut être de nature à toucher le cœur de l'autre. Quand l'Eglise catholique a multiplié ses gestes de pardon et d'ouverture à d'autres communautés religieuses, elle n'a rien demandé en échange.

Mais, pour certains, l'identité chrétienne est en crise, dans une Europe touchée par l'immigration musulmane...

Je n'aime pas ce mot de crise, lié à la désaffection des Eglises en Europe. Je préfère parler des douleurs de l'accouchement de l'homme dans une société postmoderne. "Les hommes semblent fatigués par le métier de vivre", disait Cesar Pavese. Or, nous ne sommes pas capables de proposer un christianisme pertinent appliqué à notre vie quotidienne. En même temps, les prophètes de la sécularisation nous avaient annoncé un monde où Dieu aurait disparu. Au lieu de quoi, nous assistons aujourd'hui à l'explosion d'un "sacré" sauvage.
Nous devons donc repenser notre action, nous remettre à proposer le Christ comme un événement, non avant tout comme une doctrine morale ou une ascèse. Un événement, c'est-à-dire le Fils de Dieu qui s'est fait homme, son histoire, son message transmis par des communautés fortes et vivantes. Que désire l'homme postmoderne, sinon le bonheur et la liberté  ? Or n'est-ce pas le programme de vie qu'offre le christianisme aujourd'hui, délivré des conceptions absolutistes et réductrices de l'histoire qui ont fait tant de mal au XXe  siècle  ? Le Christ n'a rien dit d'autre que ces mots pleins de sens  : "Viens, suis-moi, si tu veux t'accomplir."

Propos recueillis par Henri Tincq
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